M@cbeth

L'opéra ouvre sa saison sur l'un des titres verdiens les plus difficiles à mettre en scène, à chanter et à diriger. Le pari était osé mais tout était réuni pour que spectacle soit total. La Première a cependant laissé un goût amer. Pascale Clavel


Côté fosse, le compte est bon ; Kazushi Ono à la baguette obtient de l'orchestre un jeu d'une souplesse et d'une élégance incomparables. Avec sa lecture toute enflammée, Ono appose le cachet de l'authentique grandeur verdienne : la musique est mise en valeur jusque dans les moindres recoins, dans les nuances les plus fines comme dans les explosions les plus folles.

Les chœurs, un peu ridiculisés par des costumes à l'avenant, gris bleu, sévères et serrés (n'est pas Pina Bausch qui veut), ont été quant à eux d'une belle homogénéité et d'une précision toute remarquable. La distribution, qui fait appel à des artistes plutôt confidentiels pour les rôles titres, est assez hasardeuse : Evez Abdulla incarne un Macbeth honnête sans plus et Iano Zanellato campe une Lady Macbeth crédible sur le plan scénique, moins sur le plan vocal. Tous deux ont mis plus d'un quart d'heure à trouver leur voix et se sont régalés tour à tour dans ces vocalises dont seul Verdi a le secret. 

Des écrans très plats

Ivo van Hove voudrait nous faire croire qu'il adopte une véritable audace – qui n'en est vraiment plus une : celle de transposer l'intrigue de Macbeth dans une agence de notation en plein cœur de New-York. Des écrans plats, un personnel qui s'agite IPad à la main où téléphone portable greffé à l'oreille… Rien n'en sort pourtant. Quant au travail du vidéaste Tal Yarden, il souligne, surligne, stabilote à l'excès ce qui se passe sur le plateau. Nous ne sommes plus à l'époque du Saint François d'Assise de Messiaen, à l'Opéra Bastille, en 1992, lorsque Peter Sellars remplissait l'espace de plus d'une centaine de téléviseurs...

L'usage de la vidéo en 2012 se doit d'être encore novateur où ne pas exister. Ivo van Hove n'est pas allé au bout de sa démarche, on s'ennuie par le regard, même si on reste émerveillés par la musique de Verdi, par tout ce qui jaillit de la fosse. Macbeth veut le pouvoir, Lady Macbeth veut être reine et cela suffit à Ivo van Hove pour se dire que « dans le monde actuel, c'est le règne de l'argent, des affaires qui régit tout, les politiques comme les peuples. Alors il faut situer l'action de nos jours. Je suis convaincu que si Verdi avait écrit Macbeth aujourd'hui, il l'aurait fait dans le monde des affaires.»  Au cours de cette soirée, l'élégance du discours était pourtant du côté de Kazushi Ono, chef d'orchestre au service d'une partition sublime.

Macbeth
À l'Opéra de Lyon, jusqu'au 27 octobre

 

 


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