L'art est un jeu d'enfant

Ça y est, c'est la sacro-sainte trêve des confiseurs. Les hémicycles sont déserts, les terrains de football en friche et la plupart des établissements culturels en sommeil. Bonjour l'ennui ? Non. Ne serait-ce que parce que les médiateurs des musées, eux, profitent de la période pour redoubler d'initiatives à l'adresse des plus jeunes. Décortication et coup d'œil sur quelques rendez-vous familiaux qui valent le coup. Benjamin Mialot


«Nous sommes là pour faire en sorte qu'une personne qui découvre une œuvre le fasse dans les meilleures conditions possibles. Pas pour qu'elle l'apprécie mais pour qu'elle soit titillée par elle sur les plans intellectuel et émotionnel». Ainsi s'exprime Patricia Creveaux, chargée de programmation au Musée d'Art Contemporain, quand on lui demande d'expliciter la vocation qui sous-tend les activités de médiation culturelle que propose le lieu en marge de ses expositions.

Marie-Anne Privat-Savigny, directrice des Musées Gadagne, voit pour sa part dans la somme d'ateliers déroulée en parallèle des collections présentées par ses établissements «des compléments indispensables du discours scientifique, qui insufflent de la vie aux objets exposés».

Autant dire que chez l'une comme chez l'autre, mais aussi au Musée de l'Imprimerie, où l'on partage cette envie quasi pieuse de contribuer à l'épanouissement de son prochain - Myriam Dupuis, sa chargée des activités non-scolaires, confesse vouloir «donner goût à la culture» -, vos bambins seront entre de bonnes mains s'il vous prenait l'envie de les voir passer les vacances autrement que plantés devant une ixième rediffusion de La Caverne de la rose d'or.

Les mains dans le cambouis

Ce ne sont en tout cas pas les occasions qui manquent, les trois institutions profitant du temps libre accordé aux gones par l'Éducation Nationale pour étoffer leurs offres à leur adresse. Si le grand classique demeure évidemment la visite guidée en famille, ce sont les animations encadrées qui réservent les moments les plus divertissants et les plus profitables.

Là, un seul mot d'ordre : l'expérimentation. A l'Imprimerie par exemple, les 6/8 ans sont invités, le 27, à s'initier à la lithographie avec du matériel de cuisine, tandis que leurs aînés, les 9/13 ans, pourront s'essayer à l'art ancestral de l'enluminure à partir de la première lettre de leur prénom. Si vous souhaitez être de la partie, rendez-vous le 2 janvier pour une visite de l'exposition temporaire "De la pierre à la page", consacrée à l'architecte, écrivain et éditeur Fernand Pouillon, suivie d'un d'apprentissage en famille de la gravure à la pointe sèche.

Du côté de Gadagne, le parcours présentant la façon dont Lyon a traversé le Siècle des Lumières ("Lyon au 18e, un siècle surprenant"), par ailleurs émaillé d'une petite dizaine d'installations ludiques, est assorti dans les jours qui viennent d'un atelier de fabrication d'horloge pour les 9/12 ans (les 26 et 27) et d'une session de peinture sur faïence (le 2 janvier) et d'un mini-café philo pour les 7/12 ans (le 3).

Un peu de sérieux

Tout cela est bel et bon, mais attention, prévient Marie-Anne Privat-Savigny : «Ce n'est pas la cour de récréation. Il ne s'agit pas pour nous d'occuper les enfants pendant que les parents visitent. On s'amuse, certes, mais toujours en lien avec le propos présenté». A cet effet, quand il ne s'en remet pas à ses propres médiateurs, Gadagne fait appel à des intervenants triés sur le volet en fonction de leur expérience pédagogique, à l'image des membres de l'association de vulgarisation scientifique Ebulliscience, qui animeront l'atelier horloger sus-mentionné à l'aune des découvertes faites à l'époque en matière de démultiplication des forces et de transmission des mouvements.

Un souci de rigueur qui se retrouve à l'Imprimerie, avec ses calligraphes, typographes et autres illustrateurs professionnels, et au MAC, où l'on cherche à faire comprendre «la façon dont travaille un artiste, sa démarche plus que sa technique». Dans le cadre de l'exposition "Cage's Satie", l'artiste Thomas Léon, dont le travail interroge l'usage des nouvelles technologies, aidera ainsi sur trois séances (les 26, 27 et 28 décembre) un groupe de 11/14 ans à réaliser un dispositif sonore inspiré de 4′33", partition silencieuse faisant la part belle aux bruits d'ambiance.

Quant aux 7/10 ans, ils pourront le 29 marcher sur les traces de l'avant-gardiste Georges Brecht en confectionnant un jeu de cartes à contraintes qui leur servira autant à appréhender l'exposition sous un angle atypique qu'à ré-enchanter leur quotidien. Sachant que ces actions et toutes celles listées précédemment sont tarifées entre trois et douze euros, soit au maximum un dixième de la redevance audiovisuelle donnant droit à la fameuse rediff de La Caverne de la rose d'or, on peut vous le confirmer : c'est Noël.


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