Volutes théâtrales


Après trois créations (Le Cas Blanche-Neige, La Théorie de Mars et aujourd'hui Variations sur M.), il ne fait aujourd'hui plus aucun doute que Meissoune Majri-Péjeot et sa compagnie ETC ont créé un univers qui leur est propre. Même si les textes sont très hétéroclites (signés respectivement d'Howard Barker, Claude Monteil et Régis Pégeot), on a désormais très envie de voir ce que la jeune artiste pourra inventer avec des écrits classiques (une tragédie racinienne ? Un Ibsen ou un Strinberg ?) voire avec du contemporain incisif et déchirant (David Harrower plutôt que Sarah Kane). En attendant la suite, avec Variations sur M., elle sort du récit narratif qu'était notamment La Théorie de Mars et s'attaque à Serge Gainsbourg. Mais de cet artiste majeur qui déclarait avec provocation faire un art mineur, elle ne cherche pas à plagier les mimiques. Sans le caricaturer, elle s'attache à Marilou, cette gamine lubrique qui rend fou d'amour le journaliste d'une feuille de chou - qui se cache donc la tête dans son journal comme le dit le titre de ce concept-album édité en 1976. Au plateau : ils ne sont pas deux mais cinq, comme si les protagonistes avaient un écho soulignant leur folie. Très chorégraphiée et ponctuée de fondus au noir, la mise en scène est fluide malgré les difficultés inhérentes à ce type de travail. Meissoune Majri-Péjeot ne choisit pas la facilité en multipliant les entraves au jeu. Mais les cinq comédiens qui n'en font que deux (leurs personnalités s'effaçant fort heureusement derrière le personnage) s'en sortent aisément à force de précision dans ce spectacle conçu au millimètre sans être dénué d'émotion.

Nadja Pobel


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