Revue des revues

Malgré leur mort clinique annoncée, les revues d'art bougent encore. Mieux, à Lyon, "Initiales" vient de naître à l'Ecole des Beaux-Arts. Et d'autres, guère plus anciennes (Hippocampe, Specimen, Rodéo), nous donnent rendez-vous pour une rencontre avec leurs responsables à la galerie Descours. Jean-Emmanuel Denave


Désuet le papier ? Enterrées les revues ? Passée de mode la critique d'art prenant son temps et son souffle ? A Lyon, en l'espace de quelques mois et à contre-courant de toutes les idioties proférées sur le tout numérique, trois revues d'art de qualité ont vu le jour. Et c'est loin d'être l'affaire de "vieux cons" hors de l'époque et ne sachant pas manier une souris… Gwilherm Perthuis, qui n'a pas passé la barre de la trentaine, a fondé il y a quelques années la belle revue semestrielle et pluridisciplinaire Hippocampe (arts, littérature, sciences humaines), dont nous avons déjà fait l'éloge dans ces colonnes et qui sortira ces jours-ci un nouvel opus consacré au Liban. Non content de cela, l'agitateur d'idées a lancé en octobre dernier un mensuel du même nom : quatre grandes pages débordant de textes où l'on peut lire de longues critiques d'expositions, des chroniques de spectacles, de livres ou de disques. Dans un premier édito tonitruant, il écrit : «De plus en plus de médias publient des papiers généraux sur des expositions qui n'ont pas encore ouvert leurs portes et sur lesquelles ils proposent simplement quelques arguments tirés des dossiers de presse. Les magazines artistiques, qui connaissent un véritable succès, ne cherchent malheureusement plus à se distinguer par l'originalité de leur approche ou par la pertinence des descriptions offertes par leurs chroniqueurs, mais ils se contentent d'entrer dans une compétition visant à publier le premier un article sur l'exposition phare du moment».

Foules

«Une revue est une foule dans la rue» lit-on dans un autre édito, celui de la revue d'art et d'essai Specimen, fondée par une poignée d'étudiants de l'Ecole Normale Supérieure Lettres de Lyon. Après des débuts un peu balbutiants (une actualité un peu "branchée" et parisienne, des textes littéraires originaux assez "narcissiques"), la publication a pris son envol. Son cinquième numéro fourmille de sujets fouillés et originaux : les liens inattendus entre le philosophe Gilles Deleuze et le théâtre, la subversion de l'acte créateur dans le cadre d'un asile psychiatrique… Plus récent encore, le semestriel Initiales, né sur les terres de l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Lyon, «fait le pari qu'une école d'art est aujourd'hui l'un des lieux les plus aptes à produire et organiser des formes et des pensées nouvelles». La revue se présente sous forme de publication monographique (avec des angles multiples, des essais, des interviews, de nombreux documents iconographiques, un DVD…) avec un premier numéro consacré au chef de file de la mouvance Fluxus, George Maciunas. Un deuxième numéro dont la publication est déjà prévue en juin s'intéressera à l'artiste John Baldessari.

Table ronde autour des revues Hippocampe, Rodéo et Spécimen
à la Galerie Michel Descours, mercredi 20 février


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