L'académie Hayward


Voilà un homme qui a fréquenté Brian Eno et Phil Manzanera (Roxy Music), Arto Lindsay ou Don Cherry, sur une multitude de projets barrés à souhaits, a enregistré avec des riot grrrls pur jus (Lora Logic de X-Ray Spex, The Raincoats) et même Everything but the Girl. Mais un homme dont le principal fait de gloire est d'avoir été leader-batteur du trio This Heat avec Charles Bullen et Gareth Williams au milieu des années 70, à l'époque où l'expérimentation s'apparentait à une quête quasi-mystique aux résultats hasardeux.

This Heat s'intercala ainsi, dès 1976, pile entre l'implosion du rock progressif et l'émergence du post-punk, en une sorte de chaînon manquant frappé du sceau du krautrock (notamment de Faust). Un peu à la manière des Young Marble Giants, dans un style très différent, This Heat – par ailleurs très marqué politiquement, dans un monde en pleine décolonisation et où la guerre froide se chauffe à la menace d'une extinction nucléaire – expérimenta l'alliage de bandes bricolées, de sons de récup' et d'instruments bruts.

L'expérience fut courte – trois sorties en six ans – mais ô combien intense, les disques marquants et le statut rapidement culte – le site Pitchfork classera Deceit parmi les meilleurs albums des années 80. Par la suite, Hayward ne quittera jamais l'univers du rock expérimental, aussi large soit-il, notamment avec Massacre (Fred Frith et Bill Laswell) et ne se départira ni de ses engagements, ni de ses bizarreries (on le vit ainsi participer à une extension musicale de L'Etrange Festival en 2004). Voilà un homme qui, à sa manière, est une légende. Et un secret bien gardé.

Charles Hayward
Au Sonic, jeudi 16 mai


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