Festin aux Célestins

Alors que s'achève tout juste, sur le plateau des Célestins, une version tonitruante de "Cyrano" (avec un Torreton sidérant), le théâtre de la Ville de Lyon annonce une future saison résolument européenne et contemporaine. Laquelle sera lancée par la mise en scène de "Chatte sur un toit brûlant" par Claudia Stavisky et l'indispensable festival international Sens interdits. Nadja Pobel


Bien sûr, nous sommes aux Célestins, un des théâtres d'excellence de la région, où ce sont les mots qui sont portés aux nues au fil des très nombreux levers de rideaux (270 lors de la saison qui vient de s'écouler). Ce sont toutefois des chiffres qui nous permettront d'y voir plus clair dans sa saison 2013/2014 : un tiers de spectacles mis en scène par des femmes, dont la moitié écrits par la gente féminine, cinq grands maîtres du plateaux (Bondy, Ostermeier, Lupa, Goebbels, et Vogel), neuf pièces internationales, un tiers de la programmation composée de compagnie de la région Rhône-Alpes (Nöjd, Haut et Court…).

Des locaux et des stars

Du côté des mots, les premiers à résonner seront ceux de Tennessee Williams avec Chatte sur un toit brûlant, créé cet été au Château de Madame de Sévigné à Grignan (44 représentations !) et repris dès le 19 septembre. Autre résident (temporaire), le circassien Mathurin Bolze qui présentera en novembre Ali + Nous sommes pareils à des crapauds qui dans l'austère nuit… (attention, titre à rallonge). Parmi les temps forts attendus, citons Les Fausses confidences mises en scène par le directeur de l'Odéon à Paris, Luc Bondy, avec un casting vedette incluant Isabelle Huppert, Louis Garel, Bulle Ogier et Bernard Verley (avril) et Non réconciliés de et avec François Bégaudeau (avril). Enfin, question jeunesse et théâtre contemporain, les Célestins (dans leur petite salle modulable) feront la part belle à Howard Barker via une pièce inédite, Innocence, (en janvier), grâce aux Nöjd. À découvrir également : Une heure et dix-huit minutes, pièce documentaire d'Elena Gremina par la compagnie Gazoline (février).

Sens interdits obligatoire

En parallèle, les Célestins organiserontt pour la troisième fois le festival Sens Interdits. Du 23 au 30 octobre, à domicile mais aussi au TNG, aux Subsistances, au TNP, au Radiant, à la Renaissance, aux Asphodèles, à la Croix-Rousse, à l'Elysée et à l'Opéra, Patrick Penot, co-directeur du théâtre, et fondateur-programmateur de cette manifestation, prouvera à nouveau que lorsque le théâtre est politique, il est infiniment passionnant et même parfois nécessaire. Il n'est pas là question de querelle de parti ou de programmes et de promesses mais bien de résistance, du politique plus que de la politique.Des Indignados du théâtre en quelque sorte. Des troupes égyptienne, allemande, hongroise, chilienne… viendront ainsi dire l'état de leur monde.

D'autres seront de retour pour présenter la suite de ce que l'on avait découvert avec délectation lors de l'édition précédente, en 2011. C'est le cas par exemple du chœur de femmes polonais, des gamins cambodgiens de Batambang, qui racontent leur histoire tragique entre Sihanouk et Khmers rouges ou de la Russe Tatiana Frolova pour une création loin du théâtre officiel de son pays. À retenir aussi, un jubilatoire spectacle sans autres acteurs que le spectateur : dans Pediente de voto, à chacun de voter en répondant à une litanie de questions de plus en plus pernicieuses, lesquelles dessinent un tableau pertinent de la société que l'on se choisit et du degré de résignation ou de persévérance dont chacun fait preuve pour soi ou la collectivité. Grisant.


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