Étreinte brisante


Jusqu'au début des années 1990, Germantown fut une ville sans histoire. Fondée à la fin du XVIIIe siècle par des colons allemands et sise, dans le Maryland, à quasi équidistance de l'infréquentable Baltimore et de la bureaucratique Washington, elle pouvait se vanter d'un taux de criminalité des plus modestes, d'un humanisme précoce (on s'y indigna de l'esclavage dès 1688), d'une belle santé économique... Et puis Clutch est arrivé. Depuis, il flotte en permanence comme un air d'incrédulité, voire de suspicion, sur les deux douzaines d'espaces verts dont la municipalité tire une partie de sa fierté. Il tient en une interrogation : comment un coin si paisible a pu voir naître une musique aussi implacable que celle de ces quatre types aux mines d'équarrisseurs ? Mystère et boule de gomme brûlée.

On s'explique en revanche très bien le fait qu'en matière de heavy rock, ils ne souffrent d'aucune concurrence : parce que chez eux, la puissance et l'inflexibilité sont au service d'un vrai sens du groove et de la recherche permanente d'un état de transe, respectivement hérités du funk cuivré à la Chuck Brown et du blues ensorcelant d'un Screamin' Jay Hawkins. Une dizaine d'albums à réveiller les morts – au sens littéral, si l'on en croit l'intérêt des créateurs du jeu Left 4 Dead et de la série The Walking Dead pour leurs riffs abrasifs et les vociférations jugulaires du broussailleux Neil Fallon – en témoignent.

Benjamin Mialot

Clutch + The Socks
Au Transbordeur, mardi 18 juin


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