Street Fighter


Quoi de mieux quand on organise un festival de rue gratuit que de faire appel, pour sa programmation musicale, a un authentique gars de la rue ? C'est sur Tottenham Court Road ou sur Brick Lane, à Londres, qu'a été découvert cet émule de Rémy Bricka et de Jimi Hendrix qu'est Lewis Floyd Henry. Rémy Bricka pour le côté homme-orchestre, même si à vrai dire, on en a connu de plus rock'n'roll, genre Bob Log III, et Jimi Hendrix pour le jeu de guitare incendiaire et l'inspiration. Résumons nous donc : Lewis Floyd Henry joue de la guitare, de la batterie et de tout un tas de petits trucs, et son idole est Jimi Hendrix. Le genre de gars facile à programmer car il voyage avec sa maison (on dit que longtemps il n'en eut même pas) et son matériel sur son dos, d'où le titre de son album, à traduire ainsi : «Un homme et son landau de 30 W».

Inutile donc de convoquer des trente-cinq tonnes pour la logistique du bonhomme. Ni d'ailleurs pour faire du bruit à sa place. Car Lewis fait à lui tout seul autant de boucan qu'une autoroute et manifeste autant d'agitation qu'une rue bondée un jour de soldes ou de manif (ou les deux). Côté influences, outre Hendrix, auquel il ressemble, ce guitariste précoce (il a commencé à tâter du manche à l'âge de deux ans) n'a guère de préférence, s'attaquant avec la même verve psychédélico-blues à des champs (de pavot ?) aussi différents que Black Sabbath ou le Wu-Tang Clan. Tout en n'oubliant pas de composer lui-même des morceaux bien saignants qui provoqueraient facilement une hémorragie du conduit auditif.

Mais LFH est aussi un maître de la rythmique, laquelle peut paraître sauvage et indomptable mais ne reflète en réalité que de la maîtrise. Car c'est encore quand le travail ne se voit pas, qu'il semble couler de source, qu'il est encore le plus frappant. Cette vérité est encore plus avérée que d'habitude avec ce musicien qui pourrait à la fois reprendre le Je suis né dans la rue de Johnny et le Street Fighting Man des Stones, tubes de gars qui veulent en découdre, tout en affichant l'enthousiasme de ceux qui, comme chez les Pogues, se trouvent toujours «on the sunny side of the street».

Stéphane Duchêne

Lewis Floyd Henry
Au Square de la Doua, vendredi 21 juin
Place Chanoine-Boursier, samedi 22 juin


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