Nocturne américain

Dans le cadre du somptueux château de Madame de Sévigné, à Grignan, les personnages de Chatte sur un toit brûlant, de Tennessee Williams, prendront la parole durant tout l'été. Un véritable marathon théâtral, mené par la metteur en scène Claudia Stavisky, également directrice des Célestins, à Lyon. Nadja Pobel


«Quand on a vu le film, on n'a pas vu la pièce» nous affirmait Claudia Stavisky au moment du dévoilement de la création de Chatte sur un toit brûlant en mars dernier. Et pour cause : Tennessee Williams lui-même détestait cette adaptation, pourtant portée avec un charisme foudroyant par le duo Elizabeth Taylor / Paul Newman. Point de stars US cet été, mais la grande Laure Marsac, Pirate césarisée de Jacques Doillon en 1985 (à 14 ans !) qui arpente depuis les plateaux de théâtre et de tournage, dans le rôle de Maggie, et Philippe Awat, un autre habitué des planches, dans le rôle de Brick.

Et c'est dans la nuit drômoise, en lieu et place du Mississippi, que le couple va se distendre, alors que la famille Politt célèbre le soixante-cinquième anniversaire de son patriarche. Lui noie dans l'alcool la perte de son meilleur ami tandis que son frère aîné spécule pour récupérer le domaine de plantation de coton du père ; elle tente en vain de sauver son couple, comme une lionne. Ou comme une chatte qui resterait sur son toit brûlant jusqu'à ce que l'air redevienne respirable et la vie possible.

Soudain l'été prochain

Il a fallu une certaine audace à Claudia Stavisky et à la direction des Fêtes Nocturnes de Grignan pour choisir ce texte qui, en dépit de sa renommée, n'est pas un classique du répertoire. Le pari est d'autant plus osé qu'ils entendent réunir sept cent quatre-vingts spectateurs chacun des quarante-quatre soirs que sera donnée la pièce – avant d'être jouée aux Célestins en début de saison 2013/2014. Du jamais vu, nonobstant quelques exceptions parisiennes. Au-delà de cette prise de risque, Claudia Stavisky continue avec Tennessee Williams sa plongée dans l'Amérique d'après-guerre, entrevue l'an dernier avec Mort d'un commis voyageur d'Arthur Miller, un matériau bien plus politique que celui-ci qui ne l'avait pas empêché de signer un spectacle sans fioriture et d'une forte teneur émotionnelle. Stavisky dit vouloir s'attaquer avec ce drame «à un des rôles féminins les plus beaux de la littérature contemporaine». Non sans remuer les passions humaines qui ont probablement animé l'histoire de ce cadre théâtral idyllique qu'est le château de Grignan.

Chatte sur un toit brûlant
Aux Fêtes nocturnes du Château de Grignan (26), du samedi 29 juin au samedi 24 août


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Man of steel