Sugar man

Au terme d'une pré-ouverture estivale entièrement sold out, Le Sucre a officiellement ouvert ses portes début septembre. Présentation de ce club multi-facettes sis à la Confluence avec Cedric Dujardin, son directeur d'exploitation. Propos recueillis par Térence Caron


Vous avez été coordinateur général de La Plateforme pendant sept ans, qu'est-ce qui vous a amené au Sucre ?

Cédric Dujardin : Ce qui m'a amené au Sucre c'est d'abord mon amitié pour Vincent Carry et mon histoire avec Nuits Sonores, qui date de très longtemps. Un projet comme celui du Sucre, ça n'arrive qu'une ou deux fois dans une vie. Un nouveau lieu de cette ampleur qui s'ouvre à Lyon, c'est assez rare pour être intéressant à plein d'égards. C'est très complémentaire de la Plateforme. J'aurais pu rester sur le bateau et bénéficier de mes sept ans de travail, avec deux cents dates par an. J'ai préféré tenter une nouvelle aventure, sur un projet excitant.

 

Comment s'est monté le projet ?

Nuits Sonores cherchait depuis longtemps un lieu pérenne pour accueillir le festival, mais c'est en Novembre 2011 que Vincent Carry est venu me voir en me parlant de ce lieu. On a mis ensuite deux ans pour concevoir le projet. L'idée c'était un endroit bicéphale, avec une partie artistique qui est gérée par Arty Farty, organisateur de Nuits Sonores, et une partie business qui alimente l'aspect culturel et que je gère.

 

Vous accueillez en effet des entreprises pendant la semaine pour des conférences et des cocktails et vous gardez le week-end pour les évènements ouverts au public. Pourquoi avoir choisi ce système ?

On a une vision originale qu'aucune autre salle n'a en ce moment. On refuse de faire appel aux subventions de la région ou de la ville, à la fois dans un souci de rentabilité du lieu et par volonté d'indépendance. Ça nous permet de faire les choix artistiques que l'on veut. Les entreprises comprennent qu'il y a un intérêt à venir ici pour présenter un nouveau produit, fêter un évènement, car le lieu a une image jeune et culturelle. Dans le sens inverse, ils nous permettent de financer et faire connaître le lieu, comme avec l'opération Adidas cet été, qui offrait une place pour une paire de baskets achetée. Mais nous avons pour règle de séparer totalement le business de l'artistique : aucun partenariat n'influera sur la programmation du lieu.

 

Justement, quelle est sa ligne artistique ?
Nous avons des programmateurs qui s'occupent d'électro, d'autres de rock, d'autres de musiques plus downtempo. Mais la salle n'est pas destinée à accueillir uniquement de la musique. On va avoir pas mal de "hors musique", de "social time", de conférences, d'expos. On a fait cet été du ping pong, on va bientôt faire du yoga. On organise toujours sous forme d'évènements, en celaon est très différent d'un club qui ouvre tous les soirs. Selon les envies, on accueillera un concert, une soirée électro, une rencontre, un festival, une résonance de la Biennale avec de la disco new-yorkaise et une roller party… On ouvre si on a une raison d'ouvrir ou de communiquer. C'est ce qui va faire du lieu un endroit unique dans la ville, parce que ce n'est pas une boite qui s'est ouverte, c'est un espace social.

 

Le Sucre est situé à l'écart du centre-ville, dans le quartier de la Confluence, et reste pour l'instant assez mal desservi par les transports publics, . Comment allez-vous convaincre les spectateurs de venir ?

C'est vrai que le quartier est en construction, mais tout va à vitesse grand V. C'est vrai aussi que Gérard Collomb a un peu mis la charrue avant les bœufs en favorisant l'installation de sociétés dans le coin et en délaissant le reste, mais ça va venir. Un exemple que j'ai en tête, c'est l'arrivée du Ninkasi Kao à Gerland. C'était une zone enclavée où on ne trouvait que les locaux et les fans de foot. Il a suffit que le métro B arrive là-bas, et que le lieu "évènementialise" ses soirées pour que ça marche.

 

Il n'y a pas de signe ou d'affichage précis à l'entrée du Sucre contrairement à d'autres salles aux enseignes lumineuses, vous voulez rester un endroit secret ?

Le principe du Sucre, c'est que les gens qui y viennent sont là parce qu'ils se sont renseigné, et qu'ils sont intéressés par le lieu ou la soirée. Ensuite, ils achètent un billet comme dans n'importe quelle salle de concert. La différence, c'est qu'il n'y a aucune billetterie physique, tout se passe sur le Net. Avec ce système de billet, il n'y a pas de ségrégation à l'entrée comme dans les clubs, où on peut se faire refouler si on n'a pas la bonne chemise ou les bonnes baskets, il suffit d'avoir payé sa place.

 

Au final, le lieu est géré en majorité par des membres d'Arty Farty, est-il une extension de Nuits Sonores ?

Il y a un lien, mais il est purement artistique. La gestion est assurée par la société Culture Next, qui a été créée pour l'occasion par Vincent Carry et moi-même. Mais même sur le plan artistique, le lieu doit faire preuve d'ouverture et être une boite à outils pour des organisateurs au-delà d'Arty Farty. On a un son magistral, une acoustique parfaite, un site original qui peut servir à toutes les soirées culturelles possibles. On ne se refuse rien et ça rend le projet passionnant.


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Nocturne au musée des Beaux-Arts de Lyon le 4 octobre