Piège de Crystal

Dans la famille Crystal, on demande les Fighters : d'authentiques cinglés mélangeant pop anglo-saxonne et folk basque, reliquat d'une supposée ascendance espagnole, avec une efficacité piégeuse car irrésistible. Stéphane Duchêne


En matière – c'est le cas de le dire – de tendance de noms de groupes, on aura à peu près tout eu, par vague :  les groupes en The ; les bègues (Hey Hey My My, The Ting Tings, Birdy Nam Nam) ; les fétichistes du poney (Pony Hoax, Poney Express, mylittlepony) ; les fétichistes du poney bègues (Pony Pony Run Run) ; les allergiques aux voyelles et au pollen (BRNS, SBTRKT, MSTRKRFT) ; les "moi et les autres" (Slow Joe & The Ginger Incident, Christine and The Queens, Sallie & The Sound Outside…) et les bavards mégalo (Clap Your Hands Say Yeah !, You Say Party ! We Say Die !...).

On pourrait continuer comme ça pendant des heures mais force est de constater qu'à égalité avec le poney, le cristal est sans doute l'une des tendances patronymiques les plus étranges. Surtout si l'on considère que les formations (Crystal Castles, Crystal Antlers, Crystal Stilts et donc ici Crystal Fighters) qui l'adoptent semblent n'avoir pour seule ambition, quelle que soit l'esthétique choisie, que de foutre en l'air des usines entières de cristal de Baccarat ou, plus probablement, de forcer la porte de quelque labo clandestin de crystal meth (ou méthamphétamine). Oui, il faut bien se rendere à l'évidence. Ces gens se droguent.

Hyperglycémie

C'est qu'on a affaire, encore une fois, à une belle bande de détraqués : quand on fait produire son dernier album, Cave Rave, par Justin Meldal-Johnsen, ancien bassiste et producteur de Beck passablement allumé et sosie notoire du Screech de Sauvés par le gong, c'est qu'on a le cerveau qui cogne sévèrement la paroi crânienne. Le résultat est à l'avenant. Surtout si l'on ajoute que la formation est anglo-espagnole (à ce qu'ils disent) et se partage donc sans retenue aucune entre pop britonne dansante, électro en état d'hyperglycémie ou d'euphorie psycho-stimulée et… folk basque à base d'instruments dont le simple fait de citer les noms nous obligerait à coucher dehors.

Bien entendu, le tout dépassant comme souvent la somme des parties, on n'entend précisément rien de tout cela. Plutôt la folle (folk ?) cavalcade d'une bande de jeunes gandins qui auraient entrepris de jouer à chat, à cache-cache et peut-être à touche-pipi avec Animal Collective, Vampire Weekend et Yeasayer. Avec la certitude qu'à l'allure où ils jouent, et avec leur manière de courir, de danser et de se faufiler comme des anguilles sous crystal meth parmi les écueils de cristal d'une cave minuscule, personne ne sera jamais en mesure de les attraper.

Crystal Fighters
Au Kao, mercredi 30 octobre


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