Quand Lyon fait la belle

Les musées Gadagne éclairent avec pertinence l'Exposition internationale urbaine de 1914, démonstration des avancées hygiénistes de Lyon à la face du monde, avant que l'assassinat de l'archiduc Franz Ferdinand ne balaye temporairement les velléités d'Édouard Herriot. Nadja Pobel


À force d'auto-célébration muséale à quelques mois des élections, il n'y aurait qu'un pas à franchir pour accuser la mairie de se faire mousser sur le dos de ses institutions. Pourtant, à bien y regarder, toutes ces initiatives ne se valent pas. Si Lyon l'internationale (aux Archives récemment) n'était, malgré un catalogue solidement documenté, qu'un exposé hagiographique des grandes œuvres de la cité, ce qui se joue à Gadagne est autrement plus consistant et passionnant : en racontant comment l'exposition internationale de 1914 a vu le jour, c'est en effet toute la politique hygiéniste du maire Edouard Herriot et son influence sur Paris qui sont déroulées.

Refusant alors que se tienne une troisième exposition universelle dans la ville, apanage de la chambre de commerce, l'édile souhaitait un événement au rayonnement mondial dont il serait le commanditaire, obtenant de l'Etat sa bénédiction et son aide financière. Au gré des différentes salles, c'est donc non seulement toute la complexité de l'organisation dudit événement (la construction des pavillons dans un quartier encore déserté, celui de Gerland, l'enrayement de la grève de la CGT…) et ses enjeux politiques qui sont montrés, mais aussi les atouts de Lyon (soierie, cinématographe…).

Sans rancune

Pilier de ce projet urbain, l'architecte Tony Garnier affirme sur une affiche ici exposée que «l'hygiénisme devrait être source de toutes les lois», allant dans le sens du maire qui, faisant face à un doublement de la population (de 250 000 habitants sous le Second Empire à 500 000), doit développer l'assainissement et les soins (c'est à ce moment que Tony Garnier construit l'hôpital qui porte son nom). Des dessins et extraits de livres d'éducation sanitaire illustrent à ce titre, en fin de parcours, les conseils d'hygiène de l'époque et notamment les mesures à prendre pour échapper au mal endémique qu'est la tuberculose.

Reste qu'au printemps 1914, l'heure est à la fête, comme on peut le constater grâce au clou de cette exposition : un film de reconstitution en 3D et en couleurs, synthétisant tous les documents disponibles sur les pavillons et les différents plans de cette ville dans la ville à travers laquelle circula même un petit train. La déclaration de guerre du 3 août ne mettra pas fin à la manifestation, mais elle sera dès lors désertée par les visiteurs et les exposants, le décret du 27 septembre 1914 interdisant en outre le commerce avec les sujets ennemis. Lyon poursuivra malgré tout sa quête d'hygiénisme et sera, paradoxalement, la première ville française à faire confiance au savoir-faire allemand en matière d'incinérateurs dans l'entre deux-guerres.

Lyon, centre du monde !
Aux musées Gadagne, jusqu'au dimanche 27 avril


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