Elle portait du velours bleu…


C'est en janvier 1987 avec la sortie de Blue Velvet, auréolé d'un Grand Prix à Avoriaz, que la légende David Lynch commence. Après le succès culte d'Eraserhead, puis celui mondial d'Elephant Man et le bide artistique comme public de son adaptation de Dune, Lynch remet les compteurs à zéro.

Bienvenue dans une paisible bourgade américaine, où les fleurs poussent dans des jardins bien tondus, où les rossignols chantent et où… le mal grouille au fond de la terre, prêt à surgir lorsqu'un brave bougre s'écroule victime d'un infarctus. Son fils — Kyle MacLachlan, pas encore canonisé en Dale Cooper dans Twin Peaks — vole à son chevet ; en revenant de l'hôpital, il trouve dans un talus une oreille humaine coupée. Se muant en enquêteur, il suit les traces d'une chanteuse de bar, Dorothy Vallens — Isabella Rossellini, future épouse du cinéaste — victime d'un gangster shooté à l'oxygène liquide qui retient son fils et son mari en otage. Notons que la prestation, inoubliable, de Dennis Hopper relancera durablement sa carrière…

Cette découverte se fait depuis un placard dans lequel le garçon, à moitié nu, observe ce manège inquiétant. Voyeurisme, sado-masochisme, viol et violence : le tableau au départ idyllique se teinte de pulsions troubles, mettant à l'épreuve l'innocence romantique du héros — et de sa promise, une Laura Dern post-adolescente qui figure l'idéal naïf du cinéma de Lynch, résistant à l'horreur comme dans Sailor et Lula.

Blue Velvet, dont on a pu dire à l'époque qu'il était "classique", surprend aujourd'hui au contraire par les audaces figuratives de Lynch, qui n'allaient pas tarder à se commuer en expérimentations narratives…

Blue Velvet
De David Lynch (1986, ÉU, 2h) avec Kyle MacLachlan, Isabella Rossellini, Dennis Hopper…
À l'Institut Lumière et à l'UGC Ciné Cité Confluence


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