Royal récital-chorale

«Nous partîmes cinq cents; mais par un prompt renfort / Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port» écrivait Corneille dans "Le Cid". Mourad Merzouki a monté "Récital" à six, seize ans plus tard les voilà quarante. À voir à l'espace Albert Camus de Bron ou dans six mois dans la Biennale de la danse.


Il a inventé, exporté et institutionnalisé (au bon sens du terme) la danse hip hop à la française. Restait à la transmettre. Le pétillant Mourad Merzouki n'est jamais à cours d'idées et voilà que seize ans après avoir créé Récital, il actualise cette pièce chorégraphique fondatrice de son répertoire devenue un classique, dans la cadre d'un projet plus vaste nommé "Kampus".

En 1998, ils sont six sur scène et appartennaient à une compagnie dont ils ne supposaient pas un seul instant qu'elle ferait le tour du monde : Käfig. Depuis, Merzouki, quarante-et-un ans, a été décoré de multiples fois par le ministère de la culture, s'est vu confié la direction d'un Centre Chorégraphique National (à Créteil), et a construit un centre de formation/lieu de diffusion et un festival à Bron (Pôle Pik et Karavel). Et le voilà revenu à Récital.

Ils sont désormais quarante, quatre générations sur le plateau : Merzouki lui-même, toujours fou de joie de fouler la scène, mais aussi des gosses qui marchent avec talent dans les pas du maître. La bande-son mêle hip hop et notes orientales, les corps se saccadent comme traversés par une onde, les séquences de ballet collectif – qui prennent une allure d'heureuse meute - alternent avec des performances plus individuelles. Avec toujours cette volonté de ne pas enfermer le hip hop dans sa caricature.

En s'appuyant sur des éléments d'un domaine autre que le sien (en l'occurrence la musique classique, grâce à des jeux avec violons et pupitres), il décloisonne son art pour mieux l'exprimer comme il le fit en 2010 lors de sa collaboration avec le Quatuor Debussy dans Boxe boxe. Sur un plateau à peine assez grand pour eux tous, cette reprise épatante montre mieux que tous les grands discours que la danse hip hop est autant affaire de création que de filiation.

Nadja Pobel

Récital à 40
A l'Espace Albert Camus de Bron jusqu'au samedi 8 février


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