Nebraska

D'Alexander Payne (ÉU, 1h55) avec Bruce Dern, Will Forte…


Avec Sideways et The Descendants, Alexander Payne semblait avoir mis un frein à l'écueil qui guettait son cinéma : une tendance au ricanement sardonique sur le dos de ses personnages, signe d'une douce misanthropie — ce n'est pas Ulrich Seidl, quand même. Nebraska voit ce penchant ressurgir à grands pas, alors que ce "petit" film laissait penser le contraire ; cette ballade entre un père vieillissant en voie de sénilité et son fils déprimé partis chercher ensemble un gros lot imaginaire avait tout pour installer une petite musique de feel good movie folk façon Une histoire vraie.

S'inscrivant dans le sillage du Nouvel Hollywood, de ses marginaux et de son mélange de spleen et de comédie — le noir et blanc et la présence du mythique Bruce Dern en attestent — Payne finit toutefois par déraper lorsque le tandem fait étape dans la ville de naissance du père, où il retrouve sa famille de ploucs débiles. Le cinéaste déverse sur eux une charge incompréhensible — notamment les deux gamins obèses et idiots, cibles privilégiées de ses attaques — comme si les bons sentiments inhérents à son récit lui donnaient mauvaise conscience au point de devoir les contrebalancer par leur inverse absolu.

Drôle de stratégie : pour créer de l'empathie, il faut aussi susciter de l'antipathie ; dans les deux cas, on peut reprocher à Payne de tomber dans la facilité, qu'elle soit mélodramatique ou caustique.

Christophe Chabert


<< article précédent
Salaud, on t’aime