Le folk sacré


Un nom prédestiné à la pratique de la musique, des influences classieuses en terme de songwriting, des origines porteuses de symbole (La Louisiane, même si comme tout musicien qui se respecte et entend faire carrière, le bonhomme vit à New York), une bobine d'oisillon tombé du nid, une maîtrise consommée du fingerpicking et une voix un rien référencée (nasillarde, comme qui l'on sait, mais pas trop), Zachary Cale a tout sur le papier pour faire un excellent client.
 

Mais il a surtout le talent pour froisser ledit papier, l'envoyer à la corbeille et faire sa tambouille avec rien d'autre qu'une capacité hors norme à produire à la chaîne de la ballade acoustique en demi-teinte et émouvante à souhait, et à les chanter avec un timbre qui réussit le prodige d'être unique et de donner la sensation de nous être totalement familier – sans doute est-ce la raison pour laquelle on vient s'y lover avec autant de bonheur et de nostalgie. A les habiller enfin d'une atmosphère quasi magique élaborée avec le minimum.
 

De la trempe d'un Kurt Vile, en moins branché, du moins par chez nous (à New York, le label qu'il dirige a pignon sur rue, et il a son petit succès à Berlin et dans les pays nordiques), d'un Townes Van Zandt, d'un Dylan qui chanterait du Cohen (textes magnifiques à l'avenant), springsteenien par séquence lorsqu'il dégaine les synthés (le très beau Dear Shadow), on tient là un précieux folkeux, qui refuse d'ailleurs de se qualifier comme tel, considérant ce genre comme sacré. Ce qui ne fait qu'ajouter à la longue liste de ses qualités.
 

Stéphane Duchêne

Zachary Cale [+ Tachka]
Au Kraspek Myzik, dimanche 1er juin 


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Cannes 2014, jour 8. Forever Godard.