L'Île de Giovanni

De Mizuho Nishikubo (Japon, 1h42) animation


À l'ombre des studios Ghibli, la production animée japonaise réserve toujours de belles surprises. Après le sublime Les Enfants-loups, Ame et Yuki, voici L'Île de Giovanni, dont l'ambition est posée dès le départ : raconter une part méconnue de l'Histoire nippone après la Seconde Guerre mondiale, à savoir l'annexion par les troupes russes d'une petite île sauvage et la cohabitation qui s'instaure entre ses habitants et les soldats.

Comme souvent, c'est à travers les yeux de deux enfants que le récit se développe, mais Nishikubo fait peu de concessions au public familial : plaçant son film sous l'égide de la littérature — le père a baptisé ses deux fils en référence à une nouvelle de Kenji Miyazawa, auquel le récit emprunte ses moments les plus poétiques — et développant au maximum les personnages adultes — l'oncle, vagabond sympathique qui se révèlera résistant téméraire — ou la relation amoureuse entre le père et une jeune institutrice, il n'a pas peur d'explorer la part la plus noire des événements racontés.

L'Île de Giovanni, à l'image du Tombeau des lucioles de Takahata, mêle ainsi intimisme, fresque historique et onirisme enfantin, avec une belle liberté dans la mise en scène : l'arrivée des Russes ou la fuite dans la forêt enneigée permettent à Nishikubo de jongler habilement avec les points de vue, entre le fantasme de l'enfant et la réalité cruelle des événements.

Christophe Chabert


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