Dans la forêt lointaine, on entend le Kaibou


Après l'ingénieur franco-sino-marocain devenu, à la faveur d'une brève exposition au virus de l'improvisation, l'un des solistes du rire les plus doués de la pourtant très vivace scène lyonnaise (Karim Duval, pour ne pas le nommer), voici un autre curieux spécimen de minorité visible d'origine cocasse reconvertie dans l'amusement de galerie : le directeur de ressources humaines alsacien aux racines maghrébines. Son nom, c'est Foudil Kaibou, et sa première qualité est la lucidité. «Je sais ce que vous vous dites, encore un arabe qui fait un one-man-show, il va nous parler de la banlieue, du bled...», brandit-il ainsi en exergue de L'Arabe qui cache la forêt.

C'est effectivement le réflexe pavlovien que déclenchent les portraits de famille (le cousin Hicham, qui drague en ligne en se faisant passer pour un français de souche), constats sociaux (voir son édifiante théorie sur l'intégration par la picole) et chocs culturels – qu'il encaisse mieux que la moyenne, lui qui a tenu l'affiche du succès boulevardier Couscous aux lardons – entre autres passages obligés de l'humour dit communautaire qui émaillent ce premier one-man-show. Rien de très original donc, mais Foudil a pour lui son entrain communicatif, son jusqu'au-boutisme dans l'auto-dérision (de l'éducation au ceinturon à Al Qaida, rien ne lui échappe) et un sacré sens du calembour débile. La preuve : «Je cherche Mehdi, tu ne l'as pas vu ? / Non, je l'ai pas vu, mais à mon avis tu vas pas le trouver. / Ah bon, et pourquoi ? / Parce qu'il est 14h. / Et alors ? Ben faut pas chercher Mehdi à 14h». On vous avait prévenus.

Benjamin Mialot

Foudil Kaibou
A l'Espace Gerson, du mercredi 4 au samedi 14 juin


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La légèreté Caramelle