Gemma Bovery

D'Anne Fontaine (Fr, 1h39) avec Fabrice Luchini, Gemma Arterton, Jason Flemyng…


Martin Joubert, un boulanger féru de littérature, s'ennuie dans son petit village normand jusqu'à ce que débarquent de leur Angleterre natale Gemma Bovery et son mari Charles. À la fois troublé par la sensualité de la jeune femme et par sa ressemblance avec Emma Bovary, l'héroïne de Flaubert, Martin s'embarque dans un jeu fait de voyeurisme et de fantasmes, érotiques autant que littéraires, envers elle.

Cette trame-là est de loin ce qu'il y a de plus intéressant dans le nouveau film d'Anne Fontaine, mais la cinéaste n'en tire aucun point de vue fort dans sa mise en scène. Plutôt que de coller au regard de Martin et à sa capacité à interpréter sauvagement la réalité en fonction de son désir et de ses références, elle va régulièrement filmer son contrechamp, ce qui tue instantanément toute ambiguïté et tout trouble. L'exemple évident est la relation entre Gemma et Hervé, le fils à maman friqué qui devient son jeune amant fougueux ; la scène où Martin "double" leur dialogue à distance est une belle idée, mais Fontaine la réduit à néant en enregistrant aussi la vraie conversation entre les deux tourtereaux.

Cette manière tiède et rassurante de raconter son histoire introduit aussi des personnages secondaires encombrants et joués par des acteurs bien fades en comparaison des deux comédiens principaux : Luchini, dans un personnage proche de celui qu'il incarnait dans Dans la maison, et Arterton, miracle de fraîcheur sexy et de naturel espiègle, quelque chose comme une fusion british entre Bardot et Casta. Dommage que le film ne leur fasse pas plus confiance pour donner vie, drôlerie et mélancolie à son récit ; car tout le reste ne sert à peu près à rien.

 

Christophe Chabert


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