Enjoy the silence

En octobre 2012, dans un blog consacré à la scène pop islandaise, nous vous présentions entre autres espoirs locaux Of Monsters & Men et un certain Ásgeir Trausti. Huit mois plus tard, le jeune homme, alors parfaitement inconnu, ouvrait pour les précités au Transbordeur. Le voilà de retour avec une version anglophone de son "premier" album. A ceci près qu'il est maintenant la «vedette islandaise». Stéphane Duchêne


Son premier album, Dýrð í dauðaþögn, Ásgeir l'a enregistré alors qu'il était encore lycée – avec des paroles écrites par son père, poète septuagénaire  et publié sur les conseils de son... prof de javelot. Sorti en 2012, il a immédiatement battu les records de vente pour un premier album d'artiste local – 10 % de la population du pays possédant ainsi son disque, triple platiné ; guère renversant en termes de chiffres mais quand on connaît la concurrence... Il faut dire qu'on a rarement vu, à part peut-être du côté de chez Bon Iver, une telle capacité à équilibrer mélodies et textures, aussi changeantes que la météo et les humeurs islandaises, entre moments d'effondrement total et absolues élévations. On glose souvent sur les clichés relatifs au pouvoir évocateur de la musique islandaise, mais ce disque-là, s'il ne fait pas halluciner des baleines, des volcans et des elfes, dit beaucoup du paysage où a grandi son auteur.

 

 

La fée Grant

En ce qui doit donc représenter à peu près quelques semaines, le jeune homme poussé à Laugarbakki, impétueuse métropole de cinquante habitants, se retrouve propulsé sur les scènes et dans les grandes villes – ayant connu une expérience fort traumatisante de Reykjavik dans sa jeunesse, il s'était pourtant juré de ne pas retourner dans cette ville grouillante et bruyante... Mais surtout, dès lors qu'il commence à intéresser au-delà des frontières, on lui demande si par hasard, il ne pourrait pas chanter en anglais. Ásgeir, résigné, fait alors ce que peu d'artistes seraient capables de faire : il travaille sur une version anglophone de Dýrð í dauðaþögn. C'est alors qu'une bonne fée – barbue, certes, mais personne n'est "parfée" – se penche sur le berceau de ce musicien guère amoureux des Lettres : l'Islandais d'adoption et ancien Czars John Grant, qui va prendre en charge la traduction des textes et la re-production de l'album, ce qui ne gâche rien. Opération réussie : In the Silence sonne encore mieux, on peut en comprendre les paroles – même si cela n'a pas tant d'importance. Et voilà Ásgeir jouant chaque soir devant plus de personnes qu'il n'en a croisé durant toute son adolescence.

 

Ásgeir
A l'Epicerie Moderne, mardi 30 septembre


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