Il était une fois dans le Midwest

L'un, Negative Approach, est un pionnier du punk hardcore. L'autre, Hammerhead, fut aux premières loges de l'explosion noise. Les deux sont à Lyon cette semaine. Faites péter les bouchons (d'oreille) ! Benjamin Mialot


L'ennui peut-il être source de créativité ? Oui, ont répondu des scientifiques en janvier 2013, après avoir demandé à une quarantaine de clampins de recopier un annuaire puis de faire mumuse avec des tasses. D'accord, mais il y avait plus simple, comme dirait Bertrand Renard, le contrôleur mathématique de Des chiffres et des lettres. Il suffit en effet d'écouter les disques fondateurs de telle ou telle musique dite actuelle pour faire le lien : on le sait depuis la naissance du blues dans les champs de coton du sud des États-Unis à la fin du XIXe siècle, les grands cris du cœur naissent dans les endroits où le quotidien se résume à être désœuvré.

 

La faucille et le marteau

A Detroit par exemple, capitale mondiale de l'esprit Do It Yourself et bassin de la soul, de la techno, mais aussi du hardcore. Car si la côte ouest a vu naître les groupes les plus influents du genre, la "Motor City", elle, a abrité certains des plus radicaux. En tête Negative Approach, quatuor dont la carrière fut aussi expéditive que ses morceaux, déchaînements nihilistes au format Short Music for Short People (célèbre compilation punk d'une centaine de morceaux de moins de quarante secondes) devant autant au bellicisme saveur coco de la oi! britannique qu'aux mélodies chargées en métaux lourds de Black Flag. Formé en 1981, Negative Approach s'est en effet séparé deux ans plus tard, le temps d'enregistrer un EP et un album si proverbialement bruts de décoffrage – à côté, le béton du même nom passe pour du marbre de Carrare – que sa reformation fut l'une des principales attractions des vingt-cinq ans du label Touch&Go.

On doit la redécouverte de Hammerhead à un autre vingt-cinquième anniversaire. Celui, en 2010, d'Amphetamine Reptile, label qui centralisa le mouvement noise (The Melvins, Unsane, Helmet...) autour de Minneapolis. Hammerhead s'est formé en 1990 non loin de là, à Fargo, ville mortellement chiante par excellence (cf. le film et la série éponymes) que ce power trio branché hard rock a tenté de déblayer à coups de rythmiques à fragmentation et de riffs si rugueux qu'ils semblaient joués à la lime flat bastard. Trois albums bourrés de psaumes industriels n'y auront pas suffit : en 1996, au lendemain de la sortie du monumental Duh, the Big City, le groupe se séparait. L'ennui a depuis porté conseil : dans la foulée de son retour, Hammerhead a sorti deux EPs qui, rien que par leur titre, Memory Hole et Global Depression, confirment la pertinence de son vacarme.

 

Negative Approach [+Unfit + All of You Down]
Au Warmaudio, mercredi 24 septembre

Hammerhead [+ Veuve SS]
Au Sonic, jeudi 25 septembre


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Riad Sattouf, petit blond avec un crayon noir