Oracle, Ô des espoirs


Odessey & Oracle. On ne fera pas l'affront d'expliquer ces trois mots et leur légendaire coquille aux amateurs de Zombies (pas les morts-vivants, le groupe culte des années 60). Aux autres, on se contentera de conseiller son écoute sans fin. Dire que la formation lyonnaise ainsi baptisée a voulu rendre un hommage appuyé à ses illustres aînés reviendrait à enfoncer une porte ouverte. Ou alors ses trois membres et leurs invités sont de sacrés blagueurs. Car loin de se contenter d'appliquer les recettes qui firent les grands disques de l'année 68 (le précité en tête), Odessey & Oracle dévoile aussi un amour non feint pour le baroque revisité et la liturgie pop Renaissance, où se croisent viole de gambe et Korg MS-20, flûte médiévale et Casiotone, banjo et pianet, raffinement absolu des compositions et tentations lo-fi déviante.

L'alliage fait de cette véritable machine à voyager dans le temps pop et des talents ici convoqués – sublime Béatrice Morel Journel (Tara King th., Arianna Monteverdi & Baby B.) sur The Cat with Lipstick – est absolument délicieux de délicatesse et d'invention. Caressant même ici et là soul (Fixing the World) ou électro-pop (v.i.a.g.r.a). A la fois inépuisable et épuisant comme l'antique Odyssée, voilà un album qui ne s'écoute pas en faisant le ménage ou en se coupant les ongles. En dépit de réelles prétentions tubesques, il requiert attention et multiples écoutes, pour affirmer tout à fait sa personnalité : non seulement, aurait dit Gatsby, comme «une suite interrompue de gestes réussis», mais aussi un peu plus que cela. Au fond, une certaine grâce.

Stéphane Duchêne

Odessey & Oracle [+ Lucas Spirili]
Au Kraspek Myzik vendredi 12 décembre
Odessey & Oracle and the Casiotone Orchestra (Carton Records)


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