Astier en orbite

Avec "L'Exoconférence", Alexandre Astier s'envoie en l'air direction l'espace pour y régler la question de la vie extra-terrestre. Un spectacle évidemment drôle, mais aussi érudit, ludique et qui rappelle qu'en plus d'être un grand auteur, Astier est un comédien génial. Christophe Chabert


Ne jamais aller là où on l'attend, tel est le credo d'Alexandre Astier, à la télévision, au cinéma ou sur les planches. Après un superbe solo sur Bach (Que ma joie demeure), le voilà qui s'offre un one-man-show scientifi-comique où il s'agit, des Grecs anciens à nos jours, de s'interroger sur la possible existence d'une vie extra-terrestre. Enfin, s'interroger…

Astier débarque sur le plateau un cornet de pop corn à la main, gominé et tiré à quatre épingles, prêt à délivrer sa leçon à l'assistance. Conférencier hi-tech nanti d'un ordinateur "féminin" capricieux — et hop ! voilà les sempiternels problèmes de communication chers à l'auteur qui s'invitent sur scène — et d'un écran géant sur lequel vont défiler preuves et contre-preuves des thèses qu'il avance, il ne s'embarrasse ni de débats, ni de dialectique. Fruit d'un long travail de recherches et d'entretiens, le spectacle ressemble à son personnage : à la fois sûr de son point de mire et prompt à toutes les digressions, rigoureux dans son approche scientifique et complètement ludique dans sa construction.

C'est une des très bonnes surprises de L'Exoconférence : Astier distend son fil rouge par une série de sketchs drôlissimes où il incarne tour à tour un disciple un peu dépassé de Ptolémée, un rédacteur en chef speedé d'un grand journal américain, une sommité scientifique alcoolique échouée dans un bouge mexicain… C'est ainsi l'occasion pour lui de rappeler son incroyable palette de jeu, chaque personnage possédant sa couleur, son registre de langage mais aussi son élasticité physique — de la raideur à l'affaissement.

Space : press reset

On trouve donc dans le spectacle d'authentiques moments de déconne pure — notamment ce running gag sur la plaque envoyée dans l'espace pour établir une communication avec une autre civilisation, ou encore cette fausse vidéo Youtube jouée volontairement avec les pieds — et de formidables trouvailles scénographiques — ce cylindre dont l'intérieur se transforme tour à tour en frigo, en toilettes de saloon, en sas de communication avec d'autres planètes ou en entrailles d'un ordinateur géant.

Mais Astier nous embarque surtout dans un courageux voyage où religions, superstitions et conspirationnisme sont judicieusement mis à mal. Après une séquence en forme de clin d'œil au 2001 de Kubrick, il opère un extraordinaire reset technologique, repartant à zéro ou presque — une bougie, un livre de Pascal — pour remettre en perspective sa propre passion, candide et enfantine, pour les étoiles. Le spectacle aurait pu s'arrêter là, mais Astier y a rajouté quelques appendices rappelant ses qualités de musicien et de pédagogue. C'est un peu démonstratif mais, comme le reste, d'une évidente sincérité.

L'Exoconférence
À la Bourse du travail, les 19, 20 et 21 décembre
Reprise au Radiant les 10 et 11 février et à l'Amphi 3000 les 26 et 27 septembre


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