Solvo, le temps long des gitans


Esprit de troupe, es-tu là ? Si tu es là, frappe une fois. Et celui du Cirque Bouffon de répondre par de frénétiques roulements de caisse claire. Complice et enthousiaste, cette petite entreprise babélienne co-fondée en 1999 par un alumnus du Cirque du Soleil l'est effectivement. C'est même là que réside l'essentiel du capital sympathie de son troisième spectacle, dont la poésie saugrenue n'est pas sans évoquer celle du Matamore du Cirque Trottola et du Petit Théâtre Baraque.

Le hic, c'est qu'elle ne s'incarne que dans son décor, monticule de journaux froissés que quelques frémissements suffisent à transformer en îlot désert, et les interventions délicates et fantasmagoriques d'un Pierrot jongleur – en particulier un numéro de contact avec cerceau à l'exécution surnaturelle.

Le reste du temps, Solvo pêche par la maigreur de son propos – toute considération corporatiste mise à part, n'y avait-il pas supports plus appropriés que des quotidiens en voie de disparition pour déplorer la surinformation et le gaspillage de papier ? – et, surtout, la banalité de sa construction, chaque performance, fut-elle musicale, comique ou acrobatique, se retrouvant aussi peu valorisée qu'une transition.

Ça passe quand la grâce (inusable corde lisse) et l'originalité (amusante séquence de portés queer du duo La Main S'affaire) sont au rendez-vous. Ça casse quand la facilité – hors exercices de slapstick purs, le duo de clowns est aussi lourdingue que Shirley et Dino – et l'exagération – la bande-son balkano-andalouse façon Zaragraf, très prenante, est régulièrement sabotée par une Castafiore attifée en méchante de nanar SF – prennent le pas. Dans tous les cas, tout ça ne nous rendra pas la Familie Flöz.

Benjamin Mialot

Solvo
Jusqu'au 2 janvier aux Célestins


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