Podalydès express


D'une nouvelle de Tchekhov qui se lit en une quinzaine de minutes, Denis Podalydès fait une pièce d'une heure. Bien sûr, ce résumé chiffré est fort malhonnête, Les Méfaits du tabac relatant une conférence d'un certain Nioukhine qui, selon les vœux de sa femme, vient tenter d'expliquer en quoi la cigarette est nocive dans un cercle de province, ici une école de musique.

De quoi justifier la présence de Floriane Bonanni (violon), Muriel Ferraro (soprano) et Emmanuelle Swiercz (piano), toutes drapées de robes inutilement signées – ou plutôt ciglées, tels des placements de produit – Christian Lacroix. Assez rapidement, la musique baroque prend même toute la place, le comédien n'ayant qu'une portion congrue à jouer. A la place, il erre, et c'est en partie ce que Tchekhov a écrit : l'histoire d'un vieux monsieur qui se demande lui-même ce qu'il fait là et digresse sur ses états d'âme.

Coup de chance, le comédien en question est Michel Robin, 84 ans, qui fort de son incroyable expérience tient parfaitement son rôle. Ancien pensionnaire puis sociétaire de la Comédie-Française, il a joué sous la direction des plus grands, dont Alain Françon dans La Cerisaie, où il donnait la réplique à un autre acteur magistral, le regretté Jean-Paul Roussillon. S'il a l'audace de se faire diriger aujourd'hui par une génération en vogue (Lucas Hemleb, Christophe Rauck, Yasmina Reza…), Robin a surtout été un des piliers de Roger Planchon, grâce à qui il a débuté - et avec lequel il a collaboré pas moins de dix-sept fois de 1958 à 1964.

Problème : Denis Podalydès fait de son côté le minimum syndical à son poste de metteur en scène. Paresseux, il ne crée aucun liant, laissant chacun livré à lui-même. Regrettable gâchis.

Nadja Pobel

Les Méfaits du tabac
Au Théâtre de la Renaissance du mercredi 7 au vendredi 9 janvier


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