Levées de rideaux

Si une image peut en cacher une autre, elle peut aussi disparaître ou muter. De rideaux contemporains en œuvres déliquescentes et jusqu'aux expériences hybrides de l'Asie du Sud-est, l'année 2015 s'annonce plastiquement ouverte et surprenante. Jean-Emmanuel Denave


Curieuse année qui s'annonce, avec des thématiques qui pourraient sembler caduques ou oubliées. La prochaine Biennale d'art contemporain (à partir du 10 septembre), par exemple, ouvre un cycle de trois éditions consacrées au terme... "moderne" ! Alors que l'on se pensait au moins post-post-modernes, Thierry Raspail parie sur ce concept pour dire le contemporain et invite le britannique Ralph Rugoff à plancher sur cette problématique.

Plus surprenant encore, l'Institut d'Art Contemporain invite l'historienne d'art Marie de Brugerolle pour une exposition collective sur le thème du rideau (du 6 février au 3 mai) ! Une fois passée l'idée désuète du rideau peint de théâtre, on attend beaucoup de cet événement qui invitera sans doute à passer derrière le miroir, à réfléchir sur la notion essentielle de seuil, d'écran, de suspens, etc. Et ce "à travers" les œuvres de Marc Desgrandchamps, Felix Gonzales-Torres, Urs Lütti, Gustav Metzger, Steven Parrino...

En résonnance à cette exposition, on signalera celle du photographe canadien Serge Clément au Réverbère (mai-juillet), qui joue avec le "rideau" des surfaces miroitantes (vitrines, façades de verre, fenêtres, murs...), multipliant les emboîtements d'espaces de leurs reflets, voiles translucides, effets kaléidoscopiques...Mais aussi celle des "fenêtres" photographiques de Michael Michlmayr (galerie Vrais Rêves du 9 janvier au 21 février), accumulations sur une même image de plusieurs prises de vue et strates de temps.

Attention fragile !

La photographie sera d'ailleurs beaucoup à l'honneur en 2015, avec une exposition collective sur «la double vie des images» (toujours au Réverbère du 30 janvier au 28 mars), ou avec la Lyonnaise Aurélie Pétrel, accueillie à l'Espace d'Arts Plastiques de Vénissieux de la mi-février à la mi-avril. A propos de son travail, l'artiste parle de «partition», composant ses expositions en disposant ses images dans l'espace comme autant de notes de musique, et faisant jouer leur planéité ou leur aspect fragmentaire en résonance avec leur environnement concret.

Un autre fil plastique à suivre en 2015 sera celui de la décrépitude, de la fragilité ou de l'évanescence de l'image : avec Benjamin Levesque (à la galerie Pallade du 30 janvier au 14 mars) et ses toiles ou dessins évoquant des réminiscences brouillées et déliquescentes ; et avec Franck Lestard (galerie Domi Nostrae du 25 février au 4 avril) et ses aquarelles d'animaux où les coulures et le traitement des motifs évoquent l'aspect  à la fois poignant et éphémère de la vie.

Enfin, après la Chine, l'Inde et le Brésil l'an passé (exposition particulièrement réussie), le Musée d'art contemporain abordera une nouvelle partie du monde : l'Asie du Sud-est avec une trentaine d'artistes issus de cette région (Open Sea du 17 avril au 12 juillet), le jeune Toulousain Antoine Catala complètant la programmation du lieu avec ses vidéos-sculptures s'appuyant sur les nouvelles technologies.


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La danse à contre-pied