Yasmina Reza, poids plume


Il y a chez Yasmina Reza un goût pour l'infime et le ténu qui parfois frôle le rien. C'est là, dans cette mini-frontière, qu'elle situe ses textes, lesquels laissent autant perplexes qu'ils paraissent habiles. A l'instar du tableau blanc à 200 000 francs de Art, sa pièce phare, que ses trois protagonistent décrivaient ainsi : «Je n'ai pas aimé mais je n'ai pas détesté ce tableau – Mais évidemment, on ne peut pas détester l'invisible, on ne déteste pas le rien – Non, non y a quelque chose – Qu'est-ce qu'il y a ? Y a quelque chose, ce n'est pas rien». Cette pièce qui l'a mise en orbite en 1994 était déjà une satire de son propre milieu, bourgeois et mondain. Elle la prolonge avec Comment vous racontez la partie, écrit en 2011 mais dont elle signe ici la première mise en scène française.

Cette fois, elle se crée un double écrivain, invité à répondre aux questions d'une journaliste pédante et détestable dans un bled de province dont les ploucs ne sont autre que les spectateurs, autant public de la pièce que de cette rencontre. Dans ce théâtre de canapé (la première partie tire à ligne) et aux décors qui transpirent l'argent, Reza parvient certes à installer des personnages crédibles en tête le maire "sans étiquette", qui dit avec peu de mots comment survit (ou non) la culture loin des grandes villes et parfaitement interprétés notamment par Zabou Breitman, dans le rôle principal.

Ce n'est toutefois que grâce à la ritournelle Nathalie de Bécaud que le spectacle s'anime un peu, avant de s'éventer aussitôt. C'est dire si tout cela ne tient qu'à un fil.

Nadja Pobel

Comment vous racontez la partie
Aux Célestins jusqu'au samedi 17 janvier


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