Invitation à creuser

"Extraction" réunit à l'URDLA les œuvres récentes de huit artistes qui utilisent l'estampe pour compléter ou au contraire ouvrir des voies nouvelles à leur propre univers créatif. Jean-Emmanuel Denave


Comme de coutume, l'URDLA expose les estampes des artistes qui ont été en résidence lors de l'année écoulée. L'accrochage, sobre et aéré, en réunit huit de toutes générations et de toutes "obédiences". Il est à la fois une invitation à découvrir l'activité de l'URDLA et une invitation aussi à creuser des univers (catalogues et autres publications ont été réunis pour cela en fin de parcours). L'exposition s'ouvre avec cinq lithographies de Valérie du Chéné, des reprises de gouaches composées pour un livre avec l'historienne Arlette Farge sur les "lettres de cachet" (La Capucine s'adonne aux premiers venus, éditions La Pionnière). Ces lettres, au XVIIIe siècle, étaient adressées au roi par des particuliers afin qu'il intervienne pour des problèmes de police ou de moralité. A l'URDLA, c'est essentiellement le problème du risque de débordement des foules qui est représenté. Trois lithographies montrent un simple attroupement, deux autres relatent des faits plus licencieux : Capucine, une prostituée qui vendait ses charmes au tout-venant et aux militaires en particulier, et un couple qui, pendant vingt-quatre heures, s'est déplacé dans Paris en... copulant !

Eclosions

De l'histoire et ses micro-événements, on passe très vite à la nature et ses mouvements avec la série de paysages de Michel Dauvergne créée au fil de l'air (l'artiste a inventé un drôle de dispositif qui se déplace au gré du vent !), avec L'Eclosion de Guy Roussille, qui évoque tout à la fois une éruption volcanique ou une constellation imaginaire, avec les Phalènes linogravées de Rémy Jacquier ou avec le très beau dessin d'une feuille de fougère fossilisée sur une pierre de lithographie par Lucie Chaumont.

Dans un registre plus contemporain encore, Damien Cadio est passé pour la première fois de la peinture à la gravure, poursuivant son exploration de visuels collectés sur Internet, les redécoupant ou les recadrant pour en extraire des images baignées d'une inquiétante étrangeté. Enfin, deux artistes donnent quant à eux dans l'abstraction : Olivier Nottellet avec Solitaires, œuvre séduisante qui joue d'effets de perspective, de reflet, de succession de plans ; et Benjamin Hochart (né en 1982), avec des variations de couleurs sur des motifs donnés, appliquant dans le domaine des arts plastiques les méthodes de composition de la musique sérielle de l'Ecole de Vienne (Berg, Webern et Schönberg).

On passe ainsi insensiblement, à l'URDLA, de la représentation de l'histoire ou de la nature à la représentation de l'acte même de dessiner et à une répétition qui crée par elle-même un langage.

Extraction
A l'URDLA jusqu'au jusqu'au 28 mars
Première rencontre avec Benjamin Hochart le 28 janvier à 19h


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