«En 1966, j'ai vu à l'hôpital Saint-Anne, dans une petite pièce, une jeune fille prendre la position du grand arc hystérique... Si je n'avais pas vu l'incroyable de mes yeux, je n'aurais pas cherché partout le sens et la fonction de la transe ; sans cette vision troublante, je n'écrirais pas ce livre.» dit Catherine Clément dans L'Appel de la transe. La philosophe, essayiste et romancière signait-là en 2011 un passionnant petit livre : une suite de courts chapitres qui nous font voyager dans l'espace et dans le temps, passant des transes chamaniques aux mystiques chrétiennes, des hystériques de Charcot aux rave parties, aux concerts rock ou au coup de foudre amoureux, cette «transe autorisée en Europe». A partir de son propre corps poussé à ses extrêmes limites, le sujet humain s'ouvre à un autre corps, à d'autres états de conscience, à une autre sphère, à d'autres dimensions : «Dans l'être-un du coup de foudre, la métamorphose animale ou la manifestation d'un dieu propriétaire, la transe force le passage, change de peau, change de vie.» Ces états limites du corps feront l'objet d'un échange à trois entre Catherine Clément, le grand explorateur Jean-Louis Etienne et le neurologue Steven Laureys. Celui-ci s'intéresse aux états limites à la fois du corps et de la conscience à travers l'étude de cet organe commun au physique et au psychique : le cerveau. Un si brillant cerveau analyse du point de vue des neurosciences le sommeil, les rêves, les expériences de mort imminente, le coma et même... l'idée de conscience animale ! Passionnant.
Jean-Emmanuel Denave
Les états limites : le corps à l'épreuve
A l'Opéra jeudi 5 février