Avec Xavier Antin, des images se trament

Xavier Antin présente à la BF 15 deux dispositifs singuliers qui, au-delà de leur aspect assez séduisant, interrogent le passé et l'avenir des images... Jean-Emmanuel Denave


L'exposition du jeune artiste Xavier Antin (né en 1981, il vit et travaille à Paris) à la BF15 résonne avec celle de l'Institut d'Art Contemporain de Villeurbanne (dont nous vous parlons en Une de ce numéro) : des renvois historiques à la modernité artistique et une même interrogation sur les conditions de possibilité, les conditions d'apparition des images. L+T (Leger und Träger) fait directement référence à une exposition de l'artiste et architecte avant-gardiste Frederick Kiesler à Vienne en 1924. Celui-ci présentait des images de scénographies de théâtre moderne sur une structure modulaire et autoportante. «Voilà l'exposition, soudain "réduite" au seul support et aux objets exposés, flottant dans un espace nocturne et dilaté à l'infini. Les visiteurs circulent parmi les objets exposés et sont en même temps enveloppés, submergés et entourés par le support d'exposition» déclarait Kiesler à propos de son dispositif original. Xavier Antin reproduit le même type de dispositif mais pour y placer non des représentations mais divers éléments plats de son atelier : des plaques de bois ou de plexiglas, des toiles vierges, etc. Sur chaque élément, l'artiste a imprimé une trame discrète.

Entre mélancolie et utopie

Entre l'effacement d'une exposition passée et la possibilité de la naissance de nouvelles images (dont ici on ne perçoit encore que la trame), Xavier Antin propose deux installations séduisantes et un peu énigmatiques. Il fait partie de ces nombreux artistes qui semblent travailler à la fois sur la disparition des images, leur usure, leur fragilité, mais aussi sur leurs conditions de réapparition, les supports qui pourraient les recevoir à nouveau. Un art entre mélancolie et espérances utopiques où l'image, aussi, échapperait quelque peu à son créateur, lui glisserait entre les doigts. Graphiste de formation (il a étudié aux Arts Déco à Paris et au Royal College of Arts de Londres) et ancien musicien, Xavier Antin a beaucoup travaillé autour de l'objet livre et, plus récemment, sur des imprimantes d'édition, des chaînes de production graphique et l'histoire du graphisme. A la BF15, il se détourne momentanément du monde de l'entreprise et de son exploration des industries graphiques ou autres pour revenir à quelques fondamentaux : le passé, l'atelier, l'image précaire.

Xavier Antin
A la BF15 jusqu'au 28 mars


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