La Vie des gens

D'Olivier Ducray (Fr, 1h26) documentaire


On la surnomme «l'infirmière du 3e» (arrondissement de Lyon), et elle sillonne toute l'année — à cinq semaines de vacances près — les rues sur sa trottinette pour aller apporter des soins à domicile aux personnes âgées dépendantes, avec qui elle a bâti une relation de confiance. Pendant un an, au rythme du passage des saisons, Olivier Ducray a accompagné Françoise dans ses tournées, et le documentaire qu'il présente aujourd'hui offre un éclairage jamais édifiant, souvent drôle, parfois terrible sur le quatrième âge.

Le dispositif est précis — pas d'intervention du réalisateur à l'écran, jamais d'intrusion dans le périmètre des soins les plus intimes, des respirations où la rive gauche du Rhône fournit son lot de paysages dans la brume, sous la pluie ou en plein soleil — et les personnes rencontrées forment un étonnant panorama social où la bourgeoisie guindée le dispute à la plus grande misère, mais où tous se retrouvent dans cette posture de faiblesse et l'attente, inquiète, amusée ou résignée, d'une mort prochaine.

Captant avec sa caméra les détails laissant transpirer le passé de ses "acteurs" — de vieilles photos encadrées, des bibelots signifiants — mais aussi leur présent — la télé, que l'on ne veut / peut pas éteindre — Ducray parvient à communier silencieusement avec l'empathie de Françoise pour ses patients. Si le film manque parfois d'angle pour trier ses séquences, en dehors de son parti pris chronologique, il n'en perd pas pour autant son caractère saisissant, mettant le doigt sur une réalité que l'on n'a jamais autant regardée en face.

Christophe Chabert


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Olivier Ducray, réalisateur de La Vie des Gens : "Ces gens sont vos parents, vos voisins…"