Emma, c'est elle


C'est l'histoire d'une famille où tout semble aller bien. En apparence. Le père, Charles, est médecin, la fille une bonne ado et la mère, Emma, vient de trouver du travail avec une période d'essai. «Comme au rugby», explique le père à la gamine qui ne comprend pas ce terme. Entre petits gestes du quotidien et légers échos politiques, tout le monde est bienveillant. Sauf qu'Emma s'est suicidée au début de la pièce.

Écrite intégralement sur le plateau (et créée en novembre 2013 à la Comédie de Valence) par Mariette Navarro, celle-ci remonte en fait les mois et les années qui précédent l'acte, oscillant entre une variation contemporaine sur Madame Bovary et le fait-divers au cours duquel, trop enfoncé dans son mensonge, Jean-Claude Romand a tué les siens.

Ainsi s'égrènent les petits arrangements et les gros écarts (conjugaux mais aussi financiers, lorsque Emma s'endette) de cette femme comme les autres, celle dont les voisins pourraient dire à la télé qu'elle était «sans histoire». Pour raconter comment se lézarde son existence, la metteur en scène de la bien nommée compagnie des Hommes Approximatifs, Caroline Guiela Nguyen, a opté pour un décor ultra réaliste et bien mieux rangé que le nébuleux cerveau d'Emma. Les chapitres s'y enchaînent comme des plans-séquences qui seraient autant d'épisodes d'un long feuilleton (2h30) signé des frères Dardenne. La trame infernale et prenante de ce drame en train de se jouer n'empêche cependant jamais cette pièce d'être aussi très drôle (le duo père-fille fonctionne à merveille) et tendre.

Nadja Pobel

Elle brûle
Au théâtre de la Croix-Rousse du mardi 10 au samedi 14 mars


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Des amants détonnants