Le Lavoir Public à la croisée des chemins

Le Lavoir public, lieu d'art et de vie berlinois par excellence, a récemment fait appel au financement participatif pour renflouer son budget. Alors que le slogan «arm aber sexy» ne lui est jamais si bien allé, Olivier Rey, l'un de ses deux fondateurs, découvre les limites du projet. Valentine Martin


Né d'une rencontre entre le Club Théâtre, la fondation abbé Pierre pour le logement et la mairie du 1er arrondissement, le Lavoir public ouvre ses portes en 2012. L'idée est simple : créer un laboratoire artistique qui soit à la fois un vrai théâtre et un lieu à dimension plus festive, comme en regorge dans la capitale allemande.

Ce mélange de formes qui permet de croiser les gens est cher à Olivier Rey, metteur en scène dudit Club. Il signe donc avec la mairie un contrat initial, qui permet à son collectif de s'installer au Lavoir pour 365 jours. Le côté éphémère du lieu crée une émulsion et très vite le public afflue. Tellement qu'à la fin de l'année, le contrat se transforme en convention d'occupation triennale avec la mairie.

En 2015, le Lavoir a écrasé le nom de l'association de départ. Une année d'autant plus charnière qu'il change aussi d'équipe,  Julien Ribeiro, l'autre fondateur de l'association, ayant décidé de quitter l'aventure pour poursuivre un projet personnel. Reste donc à la barre Olivier Rey, qui doit faire face à un criant manque de moyens.

Pas Byzance

Car si l'année 2014, a vu sa programmation avant-gardiste (sur les questions de genre, le numérique, la performance...) couronnée d'un succès grandissant, Le Lavoir a en réalité peu de marge financière. Autofinancé à hauteur de 85%, le lieu devait trouver au minimum 4000 euros pour pouvoir rentrer dans ses frais. C'est à ce moment là qu'est intervenue la plateforme de financement participatif Ulule, où le montant désiré a rapidement été récolté, grâce à la fidélité des habitués.

Olivier Rey respire, mais sait que le lieu reste précaire : «Garder le Lavoir ouvert est un combat de tout les instants» explique-t-il. L'exigence artistique a un prix. Comme un mal nécessaire, l'équipe a aussi revu à la hausse les tarifs de certains spectacles. Dans une volonté de rester un lieu accessible, le prix d'adhésion et les tarifs du bar ne bougent pas. Il n'empêche que ces quelques euros grattés çà et là permettront de mieux rémunérer les artistes.

D'une manière générale, et bien qu'il s'en défende («Je ne fais jamais de promesses» avoue avec sérieux Olivier Rey), le Lavoir entend rester fidèle à ses engagements de départ – émergence, accessibilité au plus grand nombre, pluridisciplinarité – et garder sa liberté de ton. Avec comme ligne directrice, toujours, la fameuse règle de Brecht, qui veut toute performance doit à la fois instruire et divertir.


<< article précédent
Anton Tchekhov 1890