Le convoi des braves

En 25 ans d'existence, Lagwagon, figure emblématique du punk-rock mélodique made in California, n'a rien perdu de sa fougue et de son inspiration. Piqûre de rappel avant son concert en bonne compagnie au Jack Jack. Benjamin Mialot


Qu'est-ce qu'une bonne chanson ? A une époque où des chercheurs se piquent de pouvoir prédire le succès ou l'échec d'un single par la mise en équations de facteurs contextuels, linguistiques et harmoniques – on appelle ça la hit song science et elle n'a heureusement pas d'équivalent français pour le moment – on souscrira sans réserve à la définition de Joey Cape, l'espèce de Rivers Cuomo à poil dur qui remorque Lagwagon : «Qu'elle sonne toujours bien après qu'on l'ait réduite à une guitare acoustique et un chanteur me paraît un bon critère

Elle lui a en tout cas réussi : devenu dès son premier album une référence incontestée du punk-rock à la californienne, Lagwagon incarne depuis vingt-cinq mieux qu'aucun autre de ses valeureux compatriotes (No Use for a Name, NOFX, Strung Out...) le mélange de crétinerie – il s'est fait une spécialité de la pochette ringarde, option motif écossais et portrait de Ricain très moyen – d'indiscipline – il n'a jamais cédé aux entêtantes sirènes des majors – et de fulgurance mélodique – que Cape a développée en format folk en solo, indie pop à la tête de Bad Astronaut et what the fuck au sein du cover band à crête Me First & the Gimme Gimmies – qui caractérise cette musique taillée pour les aventures de jeunesse. Y compris celles qui se finissent en sanglot morveux sur une culotte oubliée.

La guitare bien pendue

Le huitième album de Lagwagon, qui a mis fin l'an passé à neuf ans de disette discographique – le précédent fut marqué par le suicide du batteur originel du groupe et meilleur ami de Cape, ceci expliquant sans doute cela – n'inverse pas la vapeur.

Les rythmes qui battent la chamade, les riffs taillés pour faire le show-off devant sa glace, le chant d'american dad juvénile de Cape – qu'on avait pu apprécier au naturel à l'Ayers Rock à l'automne 2011, où il se produisait avec feu-Tony Sly de No Use for a Name : Hang est au contraire un pur shoot d'adrénaline straight from the 90's, ce temps béni où l'éducation musicale était fonction d'une place dans le bus – de préférence à côté d'un mec marginalisé par sa pratique du BMX – ou d'un lien de fraternité – l'un des précédents EPs du groupe s'intitule avec beaucoup d'à propos I Think My Older Brother Used to Listen to Lagwagon.

Au Jack Jack, il sera d'autant plus efficace qu'il sera administré en compagnie de deux autres sommités du genre, Western Addiction – dans une veine plus hardcore – et The Flatliners – dépositaires d'un bon sens terrien typique de la scène canadienne.

Lagwagon [+ The Flatliners + Western Addiction]
Au Jack Jack mercredi 18 mars


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