Contes cruels du Japon


Les films les plus célèbres de Nagisa Oshima — L'Empire des sens, Furyo et Max mon amour — ont tendance à faire du cinéaste japonais un peintre des désirs interdits et de la transgression érotique ; la redécouverte, il y a quelques années, de ses premières œuvres — Contes cruels de la jeunesse ou Les Plaisirs de la chair — allaient dans le même sens, y ajoutant un sens de la narration profondément influencé par le cinéma moderne européen.

Les trois films que propose l'Institut Lumière cette semaine illustrent en revanche la part la plus politique de son cinéma, jamais totalement absente dans son œuvre, mais ici au cœur des intrigues et du propos. La Pendaison est un réquisitoire entre Beckett et Kafka contre la peine de mort et La Cérémonie, à travers l'histoire d'une famille en voie d'extinction, raconte l'Histoire du Japon au sortir de la guerre, avec un regard tranchant et ironique.

C'est ce même regard qui imprègne Le Petit garçon, une des plus belles réussites d'Oshima. Il s'inspire, comme pour La Pendaison, d'un fait-divers : comment une famille escroquait des automobilistes choisis au hasard en simulant des accidents, avant de les faire chanter en menaçant de prévenir la police.

Plutôt que d'adopter le point de vue du couple, Oshima préfère celui du fils aîné, 10 ans à peine, d'abord réticent à participer aux activités douteuses de son père et de sa belle-mère, avant d'en devenir complice et même parfois moteur. L'innocence vole donc en éclats, et l'existence nomade et criminelle de cette famille, filmée en scope dans les décors naturels des villes japonaises qu'elle traverse, dessine un portrait du Japon où la survie repose sur la bassesse et l'absence de scrupules éthiques.

Christophe Chabert

Trois films de Nagisa Oshima
À l'Institut Lumière, jusqu'au 3 mai


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