Sens dessus dessous

Peintre libre et licencieux, Gérard Guyomard présente plusieurs oeuvres des années 1960 aux années 1980 à la galerie Pallade. Un artiste du plaisir, du rire et de toutes les libertés formelles. Jean-Emmanuel Denave


Gérard Guyomard (né en 1936) fait partie de cette «bande de copains» de la figuration narrative qui, dans les années 1960, se révoltait contre l'hégémonie de la peinture abstraite en France. Un peu moins connu que ses comparses (Jacques Monory, Peter Klasen, Télémaque, Rancillac...) dont l'un vient de faire l'objet d'une grande rétrospective au Musée d'art contemporain (Erró), ce peintre mi-anar mi-égrillard est pourtant l'auteur d'une œuvre importante et prolifique.

«Certains ont fait de la figuration politique, moi j'étais contestataire à ma façon en introduisant de l'érotisme dans mes toiles» nous disait-il en 2006 lors d'un entretien à la Galerie Pallade, déjà. Si la société de consommation et l'imagerie populaire font partie de ses grandes sources d'inspiration, l'érotisme est effectivement très présent, avec force femmes dénudées aux poses lascives ou plus que suggestives : «L'érotisme, si je puis dire, je ne le fais pas exprès, il vient tout seul. La pornographie et l'érotisme font partie de la vie et je serais frustré s'ils ne se retrouvaient pas sur mes toiles. Ces formes sont belles en soi. J'ai besoin de ça, mais je ne pourrais pas l'analyser... Mes amis psychanalystes parlent d'un désir de retour à l'origine !»

Jouissances

La galerie Pallade propose une sorte de mini-rétrospective de la première partie de la carrière de Gérard Guyomard, à travers quelques toiles des années 1960, 1970 et 1980. Au-delà de cet érotisme qui libère les formes et le mouvement, Guyomard est un formidable brasseur et mixeur d'images et de techniques. Dans une palette vive et parfois acidulée, ses lignes sinuent entre plusieurs formes possibles, passent de l'intérieur à l'extérieur, d'un motif l'autre, sens dessous dessus, sans hiérarchie ni fin.

Des images tirées de magazines, d'affiches ou même de la télévision côtoient des figures peintes et dessinées, en une effervescente et libre errance des sensations et des significations, des signes et des figures, des espaces et des plans, des corps et des objets : «Les objets sont très importants pour moi : dans ma série réalisée avec la complicité de Georges Perec (avec qui j'étais très ami ; je suis d'ailleurs l'un des personnages de La Vie mode d'emploi), tous les tableaux contiennent le même nombre d'objets, et les objets se déplacent parfois d'un tableau à un autre.»

Citant pêle-mêle Jérôme Bosch, Les Tontons Flingueurs, Paul Klee, Jean Hélion, Fernand Léger, Pierre Bonnard ou le mouvement punk, Gérard Guyomard défend dans ses peintures un certain désordre : celui des pulsions et des plaisirs, des formes et des couleurs, du rire et du mouvement.

Gérard Guyomard
Á la galerie Pallade jusqu'au samedi 16 mai 


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