Une Biennale d'art... moderne !

La 13e Biennale de Lyon ouvrira ses portes en septembre. Pour patienter, voici quelques réflexions sur sa thématique, "La vie moderne", et les noms de quelques-uns des 60 artistes invités. Jean-Emmanuel Denave


Avec la 13e Biennale d'art contemporain, son directeur Thierry Raspail ouvre un cycle de trois biennales qui s'attelleront au terme problématique du moderne. Premier volet, "La vie moderne" réunit une soixantaine d'artistes internationaux qui exposeront essentiellement au Musée d'Art Contemporain et à la Sucrière. Le New-yorkais Ralph Rugoff, actuel directeur de la Hayward Gallery à Londres, en est le commissaire invité.

«La vie moderne : il y a dans ce titre une dimension (inévitablement) ironique qui évoque une période plus optimiste de l'Histoire qui se définissait par une foi inaltérable dans la nouveauté, les vertus du progrès et le caractère essentiel de la raison. Aujourd'hui, alors que les événements actuels nous rappellent constamment que la raison ne joue qu'un rôle très limité dans un monde mû par des convictions véhémentes et irrationnelles, l'expression "la vie moderne" semble être le vestige d'un autre âge.»

écrit-il.

Il est clair qu'après son apparition dans la querelle des modernes et des anciens ou sa définition par Charles Baudelaire («La modernité, c'est le fugitif, le transitoire, le contingent, la moitié de l'art, dont l'autre moitié est l'éternel et l'immuable.»), le terme de modernité semble aujourd'hui bien galvaudé et passé par les filtres d'acceptions diverses voire contradictoires.

Athéisme tragique

Malgré son apparente désuétude (on serait, selon certains, déjà post-post modernes !) ou sa polysémie, des intellectuels, et non des moindres, pensent que le moderne est aujourd'hui encore une tâche inachevée, ou même inachevable. Le moderne, pour le philosophe Philippe Lacoue-Labarthe, c'est ce moment où l'art s'est détaché du sacré (du moins du religieux), où il ne peut plus ni s'appuyer ni se tourner et nous tourner vers lui.

Le moderne serait donc cette tâche (urgente ?) d'assumer une sorte d'athéisme tragique. Pour Henri Meschonnic,

«La modernité est un combat. Sans cesse recommençant. Parce qu'elle est un état naissant, du sujet, de son histoire, de sons sens. Elle ne cesse de laisser derrière elle les Assis de la pensée, ceux dont les idées sont arrêtées, se sont arrêtées, et qui confondent leur ancienne jeunesse avec le vieillissement du monde. La modernité côtoie ce cimetière des concepts fossiles dont nous sommes encombrés. Et qui rendent sourds. Sourds à ce qui vient.».

Espérons que Kader Attia, Michel Blazy, Cyprien Gaillard, Camille Henrot, Liu Wei, Tony Oursler, Edward Ruscha et les autres artistes invités à la prochaine Biennale seront de bons fossoyeurs !

13e Biennale d'art contemporain de Lyon
Du 10 septembre 2015 au 3 janvier 2016


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Grégoire Le Du, manager en développement durable