Top Gunn


La dernière fois où l'on s'est fait engueuler en public, c'était à cause de Steve Gunn, quand un scénariste BD lyonnais armé d'une bière nous a lâché : «C'est quand même incroyable que tu ne sois pas venu à Steve Gunn la dernière fois, c'est vachement bien, t'as intérêt à venir quand il repasse en mai.» Steve Gunn de retour, on a donc coché la case dans notre calendrier, et pas seulement à cause de cette injonction. Parce qu'aussi c'est "vachement bien" (et l'on pourrait presque s'arrêter là).

La musique de Steve Gunn est celle d'un maître zen qui n'a que faire de sa surcompétence. Proche d'Adam Granduciel (The War on Drugs) et de Kurt Vile qui lui voue un véritable culte, Gunn est le dernier des trois à faire parler de lui par ici. Cela fait pourtant pas loin de dix ans qu'il aligne les albums lumineux, jusqu'à Way Out Weather l'an dernier, chef-d'œuvre d'aboutissement pour ainsi dire, qui le voit transposer les mélodies et les structures musicales des Appalaches et, avec elles, les Appalaches tout entières, en un autre cosmos – le tout depuis Brooklyn.

Renversantes par l'évidence cachée derrière leur sophistication, ses psych-folk-songs donnent l'impression que Gunn laisser sombrer les ruines du vieux monde dans des arpèges glissants et des slides mouvants. Ne cherchant pas, contrairement à un Granduciel, l'immensité, il se contente,  d'une voix détachée, d'atteindre une sorte de grandeur et de plénitude qu'on lui envie. C'est sans doute pourquoi il est si important de se rendre à ses concerts.

Stéphane Duchêne

Steve Gunn [+ Mary Lattimore & Jeff Zeigler]
Au Sonic jeudi 28 mai


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