La saison 2015/2016 du Théâtre de la Croix-Rousse

Ludique et politique est le visuel de la nouvelle plaquette (une croix faite de craies fragilisées) du Théâtre de la Croix-Rousse. Ludique et politique (et du coup franchement excitante) sera sa saison 2015/2016. Benjamin Mialot


Des Fourberies de Scapin décapées au karcher par Laurent Brethome, le crépusculaire Mon traître d'Emmanuel Meirieu, David Bobée et son Lucrèce Borgia à (trop) grand spectacle... L'entame de la saison 2014/2015 du Théâtre de la Croix-Rousse fut l'une des plus fulgurantes qu'on ait connue depuis l'arrivée à sa direction de Jean Lacornerie.

La rentrée 2015/2016 est bien partie pour soutenir la comparaison, ne serait-ce que parce qu'elle s'ouvrira sur la reprise du Bigre de Pierre Guillois, comédie muette «à voir et à revoir» (du 29 septembre au 3 octobre) selon la formule consacrée car aussi hilarante qu'ingénieuse.

Suivront :

Autant de pièces que relient un fil jalonné d'inextricables nœuds sociaux. A l'instar du palmarès du dernier Festival de Cannes, la prochaine saison de la Croix-Rousse sera en effet pas mal en prise avec les maux de l'époque, furent-ils cycliques (Fleisch, un «marathon de danse» de Pauline Laidet ancré dans la crise des années 30, du 10 au 12 mai), mentaux, avec L'Homme qui prenait sa femme pour un chapeau, opéra médical (on y parle d'agnosie) porté à la scène par Dominique Pitoiset (13 au 17 novembre, en partenariat avec l'Opéra de Lyon), ainsi que Rendez-vous Gare de l'est, portrait d'une trentenaire sous médication par Guillaume Vincent, un proche des auteurs du Molièrisé Crocodile trompeur (9 au 13 février), ou encore cicatriciels dans le cas de Brundibar, opéra jeune public composé dans le ghetto de Terezín que mettra justement en scène Jeanne Candel (25 mars au 3 avril, toujours avec l'Opéra) – son compère Samuel Achache proposera quant à lui, du 2 au 6 février en partenariat avec la Renaissance, La Fugue, un spectacle musical dont on ne sait pas grand chose d'intelligible pour le moment.

Faut rigoler

Qu'on se rassure, l'ambiance ne sera pas tout le temps à la "défête", notamment grâce à Lacornerie lui-même qui rejouera deux de ses créations les plus entraînantes, Bells Are Ringing à la Maison de la danse du 3 au 6 novembre et Mesdames de la halle du 11 au 28 décembre.

Dans le genre ludique, on attend au tournant la très ludique Colonie Bakakaï, décidément obsédée par les textes compliqués, puisque après son excellent travail d'après Gombrowicz, elle s'attaquera au Sentiment d'une montagne de Tarkos (13 au 16 janvier à la Renaissance), et la non moins astucieuse Cordonnerie, de retour avec une adaptation en milieu urbain de Blanche-Neige (7 au 10 juin).

Des adaptations de classiques, il y en aura quelques autres :

Enfin, on ne savait pas dans quelles cases les ranger, mais ils devraient laisser une trace dans les esprits : le fidèle Quatuor Bella (le temps d'un crossover avec le groupe de jazz noise Jean Louis le 8 avril), le collectif (oui, encore un) In Vitro pour un cycle de trois pièces (signées Brecht, Lagarce et lui-même) soldant l'héritage de mai 68 (Des années 70 à nos jours, du 16 au 19 mars) et Caroline Guiela Nguyen et ses Hommes Approximatifs, avec une sorte de Six Feet Under sur planches qui promet d'être encore plus déchirant que son flaubertien Elle brûle (Le Chagrin, du 9 au 13 février).


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