La vie comme elle vient

On désespérait de les voir se produire à Lyon. Deux ans (!) après la sortie de leur fulgurant premier album, les petits punks libertins de FIDLAR déboulent enfin au Transbordeur, du chewing-gum et du sable plein les semelles. Benjamin Mialot


YOLO. «You only live once.» C'est le code de mauvaise conduite qui régit les comportements de la Génération Y, sorte de narcissisme potache responsable, entre autres phénomènes sociologiques, du déclin accéléré du modèle traditionnel de la famille (pas grave) et de la réduction progressive de l'alphabet aux lettres M, D et A (c'est plus embêtant, en témoignent les deux faits-divers qui ont suivi et précédé Nuits Sonores 2015).

Brandon Schwartzel, Zac Carpet et les frères Elvis et Max Kuehn, jeunes Californiens à la dégaine de premiers rôles d'un film de Larry Clark, en ont développé une variante plus rentre-dedans : FIDLAR, comme «Fuck it dog, life's a risk». Le reste de leur abécédaire est à peine plus riche : B comme bière éventée, C comme cocaïne, D comme désobéissance, M comme meufs et S comme skateboard. De quoi s'en payer une bonne tranche – et au passage quelques tronches, dernièrement celles des artistes-sandwichs du MTV du tournant 80/90, de Green Day à Britney Spears en passant par Eminem, Korn et George Michael, cibles d'un amusant patchwork de clips suédés.

Blitzkrieg pop

Au-delà de sa réjouissante malice, ce jeu de massacre en carton pâte en dit long sur la façon, on l'aura compris fougueuse et iconoclaste, qu'a FIDLAR de solder son héritage local – à un bout du spectre le hardcore sans compromission de Black Flag, à l'autre extrémité la pop moirée des Byrds, et entre les deux des tas de chansons où la distorsion et la gueulante sont appréhendées comme des vecteurs mélodiques à part entière.

Un riff psychédélique à en déplumer un Black Angel par-ci (Whore), une frénétique montée de gamme "surfisante" destinée à habiller des compilations de faceplants par-là (No Waves, le programmatique Wake Bake Skate), ailleurs un power chorus geignard juste ce qu'il faut à la Weezer (40oz. On Repeat, le nouveau et déjà inusable single du groupe, pour lequel a été tournée la vidéo susmentionnée) ou une embardée en sortie de garage rock (Cheap Bear), nos quatre petits cons préférés ont en effet bien intégré qu'on ne faisait plus la nique au conformisme tout à fait comme à la glorieuse époque des Ramones.

A l'instar, en quelque sorte, des tough guys jambes à l'air de Turnstile, auxquels FIDLAR pourrait bien ravir le PB Award du concert le plus sauvage de l'année – saltos, coups de pied retournés et arrachages de micro, on a tout eu et on en redemande.

FIDLAR [+ Décibelles]
Au Transbordeur mercredi 17 juin


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Le Paris de David Bobée