Le partage des oiseaux


Il entre le premier et, seul en scène, le cheval indique que Bestias n'est pas tout à fait un spectacle d'homme à homme. Il va falloir compter sur lui comme sur ces oiseaux dont, pour l'instant, seuls les piaillements nous parviennent. Camille Decourtye et Blaï Mateu Trias, qui se sont rencontrés au Centre National des Arts du Cirque de Châlons-en-Champagne, ont une vision de leur art qui sort des sentiers battus. Très peu de performances acrobatiques au programme, mais une rencontre avec ces volatiles et deux imposants équidés, une petite fille et quelques musiciens troubadours. 

Que font-ils ? Pas grand chose, comme l'un d'eux le dit à plusieurs reprises en manifestant son ennui. Mais c'est précisément ce refus de se confronter à un tempo très relevé qui fait la force tranquille de Bestias. La troupe suit son rythme avec ces hommes momentanément désarticulés. Drôles, ils prennent des airs de danseurs et entament même une chorégraphie à quatre puis cinq qui apporte du liant à cette heure et demi faite de décalages et de trébuchements.

C'est que l'homme, pour la compagnie Baro d'Evel («grand dieu» en manouche), est un animal comme les autres ; il ne maîtrise pas tout et réagit à l'instinct. Si le numéro de quasi domptage du cheval paraît trop académique et didactique, c'est quand les circassiens se (con)fondent avec l'animal qu'ils sont le plus touchant, notamment lorsque la femme aux oiseaux s'agrippe elle-même, en second plan d'une action, à une des structures du chapiteau. De même pour cet homme se roulant dans la paille au point de construire un nid. En douceur, sans grand barouf, cette troupe s'ébroue et abolit les frontières entre l'homme et la bête.

Bestias- Compagnie Baro d'Evel from Les Nuits de Fourvière on Vimeo.

Nadja Pobel

Bestias
Au parc de Lacroix-Laval, dans le cadre des Nuits de Fourvière, jusqu'au mercredi 17 juin


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