La Belle promise

De Suha Arraf (Israël-Palestine, 1h27) avec Nisreen Faour, Ula Tabari…


La première originalité de La Belle promise tient à son cadre : nous sommes à Ramalla aujourd'hui, dans une villa où habitent trois sœurs issues de l'aristocratie chrétienne. Autant dire une enclave à l'intérieur d'une enclave, et le film de Suha Arraf, scénariste pour les premiers films d'Eran Riklis, est effectivement un conte de l'enfermement. Ce gynécée vit en autarcie selon des règles strictes, faisant comme si le temps s'était arrêté après la guerre des six jours où la plus âgée, Juliette, a renoncé à ses rêves de mariage en même temps qu'elle perdait ses terres et son statut social. Cette ambiance d'aigreur et de solennité est perturbée par l'arrivée de leur nièce Badia, récemment orpheline, qui va devoir se plier à la discipline de la villa en attendant que les sœurs lui trouvent un mari.

À mi-chemin du film d'ambiance — à la lisière du fantastique, notamment à cause des réactions de Violette, la plus névrotique et flippante des sœurs — et du conte politique, La Belle promise frappe avant tout par sa noirceur. Si Arraf fait parfois craquer le vernis autoritaire de ses personnages, c'est pour mieux, in fine, refermer sèchement le livre de la tragédie annoncée. On peut d'ailleurs voir ici, comme souvent chez les scénaristes qui passent à la réalisation, un goût prononcé pour les récits programmés pour aboutir à une fin aussi inattendue que logique ; mais le film a d'authentiques qualités de mise en scène, lui permettant d'échapper à la raideur que son sujet lui impose parfois.

Christophe Chabert


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