Sylvie Guillem : une étoile disparaît

A 50ans, la danseuse étoile Sylvie Guillem fait ses adieux et débute son ultime tournée au Théâtre antique de Fourvière. Une scène qu'elle a beaucoup fréquentée mais qui n'est malheureusement pas toujours propice à la danse intimiste. Jean-Emmanuel Denave


La chorégraphe espagnole Maria Pagès et la danseuse étoile Sylvie Guillem incarnent toutes deux l'essentiel de la programmation danse des Nuits de Fourvière ces dernières années (à quelques intéressantes exceptions près : Marie Chouinard, Sasha Walz, Ohad Naharin...). Concernant Sylvie Guillem, on ne peut affirmer s'en lasser tant ses spectacles, souvent composés de soli ou de duos, y sont difficilement visibles : on n'a jamais bien vu davantage qu'une silhouette fine et véloce gesticulant parmi des lumières colorées et un peu de musique. Bref, programmer de petites formes au sein du grand théâtre, c'est au fond vouloir s'adresser surtout à un public de pilotes de chasse.

Life in progress, annoncé comme les adieux à la scène de la grande danseuse, ne dérogera sans doute pas à la règle puisque son programme réunit, une fois encore, deux soli et deux duos (dont deux créations : le solo techne d'Akram Khan et le duo Here & After, signé du chorégraphe canadien Russell Maliphant). Nous retiendrons nos larmes donc.

Caprices

Nous les retiendrons d'autant plus qu'ailleurs, nous avons déjà pu découvrir le navrant solo Bye du pourtant génial Mats Ek (l'homme qui distord en tous sens et avec une énergie brute de décoffrage le vocabulaire classique), qui manque ici franchement d'inspiration et use jusqu'à la corde un dispositif de dialogue entre Sylvie Guillem et son image projetée, non sans y ajouter quelques effets comiques lourdauds.

William Forsythe s'en sort un peu mieux avec Duo, se contentant cependant d'un simple exercice de style où il déploie comme à l'accoutumée son sens de l'espace, de superbes jeux de lumières et la virtuosité sèche et tranchante de ces mouvements qui lui sont si particuliers.

Notre myopie n'enlève évidemment rien à l'immense talent d'interprète de Sylvie Guillem (née en 1965), étoile du Ballet de l'Opéra de Paris à l'âge de 19 ans et du Royal Ballet de Londres à partir de 1989 (son départ en Grande-Bretagne créera des remous jusqu'à l'Assemblée Nationale !). Celle qu'on dit si capricieuse a réussi, depuis 2006, à attirer avec son nom et sa virtuosité (et avec plus ou moins de bonheur) les plus grands chorégraphes de l'époque. Reste que notre plus beau souvenir à Fourvière restera ce Bolero de Maurice Béjart que Sylvie Guillem interpréta de manière si crâne et fulgurante au milieu des danseurs affolés du Ballet de Tokyo !

Life in progress
Aux Nuits de Fourvière du mardi 29 juin au ​jeudi 2 juillet 


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