Mathias Lyon : «Un travail participatif»

Mathias Lyon, 21 ans, est l'un des dix cavaliers de "On achève bien les anges". Il revient pour nous sur la méthode de travail de Bartabas et son rapport à l'équitation. Propos recueillis par Nadja Pobel


Comment avez-vous intégré Zingaro ?
Je suis arrivé à 17 ans pour Calacas en tant que danseur de hip-hop et cavalier. C'est Étienne Regnier, présent à Zingaro depuis environ vingt ans et que je connaissais qui m'a dit que Bartabas cherchait des danseurs hip-hop ; je suis passé voir une répétition, je suis un peu monté à cheval (j'en faisais depuis l'enfance), j'ai un peu dansé et ça c'est fait comme ça, j'étais engagé à la fin de la journée. Je n'avais pas encore mon bac, je l'ai eu à Zingaro !

Que saviez-vous d'Élégies avant de commencer les répétitions ?
Bartabas a commencé par nous parler de Tom Waits. La musique est souvent la base de ses créations. Et le processus est assez participatif. Par exemple moi, comme je dessine, j'ai dessiné des anges, proposé des images… Bartabas attendait de nous qu'on se documente, qu'on montre notre interprétation. Après, c'est lui qui décide, qui sélectionne ce qu'il aime. Quand le projet débute, on ne sait pas du tout ce que ça va être. Il n'écrit pas seul pendant six mois quelque chose que l'on répèterait ensemble. Ça s'est construit tous les jours pendant six mois avec ses idées, les nôtres. Il n'y a pas vraiment de règles. Il utilise ce qu'il a sous la main. Idem avec les chevaux. Ce sont eux qui l'inspirent. On ne peut pas faire n'importe quoi avec n'importe quel cheval.

Calacas et Élégies sont des créations très différentes dans leur rythme et leur atmosphère. Elles se rejoignent toutefois sur leur exigence en termes de technicité et de rigueur acrobatique...
On a effectivement la même méthodologie de travail avec les chevaux. C'est assez réglé. Nos journées se ressemblent. La journée type de travail qu'on avait pour Calacas est du même genre que pour On achève bien les anges. Mais les spectacles sont différents. Celui-là est plus long, plus marathon ; l'équipe est aussi assez différente. Dans Calacas, la majorité des scènes étaient des solos. Un cavalier entrait en scène puis un autre, etc. Là, c'est beaucoup de choses de groupe. Ce n'est pas le même travail. On est souvent  tous présents sur scène. C'est plus lourd, dans le bon sens du terme.

Bartabas dit qu'un cheval, c'est 30 minutes de préparation, 20 minutes de travail et 30 minutes d'assouplissement. Comment composez-vous avec cela ?
Oui, le cheval n'a pas l'exigence de bien faire comme un acrobate ou un danseur. C'est une question de plaisir pour lui. Le forcer n'a pas de sens ; il n'est plus beau sur scène. Dans Elégies, le cheval blanc qui court s'amuse, ça se voit. On ne peut pas les faire travailler pendant des heures et des heures, les chevaux en ont marre. Et puis il faut prendre soin d'eux, car le spectacle tourne durant trois ans. Il faut qu'ils s'échauffent correctement, qu'on prenne soin de leur corps. Le travail d'un cavalier sur son cheval, c'est un peu comme le travail d'un danseur avec son propre corps.


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