Un dîner loin d'être parfait

Avec "Psy", "Traces" et "Séquence 8", le collectif canadien des 7 Doigts de la Main nous avait habitué au meilleur. Avec "Cuisine et confessions", présenté à la Maison de la Danse pour les Nuits de Fourvière, il signe un spectacle tout en auto-satisfaction et en démagogie. Nadja Pobel


Un décor de cuisine monumental à faire pâlir tous les marquis de salades, des artistes venant à la rencontre des spectateurs qui s'installent pour s'enquérir de leur plat préféré alors que d'appétissantes émanations d'ail s'échappent du plateau : les 7 Doigts de la Main savent recevoir et allécher.

Sauf que ce prélude, même une fois les lumières éteintes, n'en finit plus, au point que le spectacle semble ne jamais commencer, nonobstant quelques numéros de jonglage avec des fouets métalliques. D'emblée, Cuisine et confessions manque cruellement de rythme – et cela se vérifiera sur ses 90 minutes – un comble pour des circassiens,  par ailleurs de très haut niveau (ah ! leur maîtrise du mât chinois...).

De là, les 7 Doigts de la Main se laissent prendre au piège de l'adresse réitérée au public, le conviant fréquemment sur scène, comme s'ils ne pouvaient convaincre par leur seul talent, allant jusqu'à se planquer tandis que trois spectateurs meublent la scène. Dans cet aveu de faiblesse, ce n'est pas tant l'embarras des cobayes qui met mal à l'aise que la limpide démission des artistes.

Se (faire) rouler dans la farine

Autre facilité : le bavardage. Chacun – le titre l'annonçait – y va de sa confession plus ou moins intime, noyée dans une logorrhée qui, même quand elle se veut poignante (un des protagonistes raconte la vie de son père arrêté par la junte militaire), tombe à plat, de la même façon que ce running gag qui voit la troupe, visiblement très contente d'elle-même, inciter sans cesse la foule à l'applaudir.

Nulle trace ici, en somme, de la modestie qui faisait de Psy ou La Vie des exercices cohérents et rigoureux. Cette fois, le sujet est plaqué sur la scénographie mais ne prend jamais corps dans les performances, à l'exception de ce moment, d'une juste douceur,  où deux jeunes hommes se retrouvent à 5h du matin pour manger un empanada et entament une danse acrobatique. Le numéro collectif suivant, sur un Boléro de Ravel revisité, offre lui aussi une unité à cette création décousue. Las, fondée en 2002, cette compagnie qui parcourt le monde avec divers castings semble victime de son succès. Résultat : moins d'inventivité, moins d'énergie, moins de précision. Et au bout du compte : l'ennui

Cuisine et confessions
À la Maison de la danse, dans le cadre des Nuits de Fourvière, jusqu'au mardi 30 juin


<< article précédent
Woodstower, toujours vert