Costa-Gavras, une conscience en action

​Avec Costa-Gavras, plus d'un demi-siècle d'images et d'histoire nous saisissent. L'institut Lumière lui rend hommage par une rétrospective, une exposition et deux soirées en son indispensable présence.


Si durant les cinquante dernières années, moult intellectuels se sont laissé berner par les miroirs aux alouettes tendus à droite comme à gauche, il en est un qui a su résister aux aveuglements idéologiques : Costa-Gavras. Usant du cinéma pour dessiller les yeux de ses contemporains, le réalisateur a consacré l'essentiel de son œuvre à mettre au jour les atteintes aux libertés fondamentales et à l'humanité. À cartographier les impasses sociales et politiques sous les régimes dictatoriaux autoritaires (L'Aveu) comme sous les démocraties (Le Couperet) ; en temps de guerre (Section spéciale, le mésestimé Amen.) comme en temps de paix (Mad City). Malgré de rares accidents (Le Capital), son parcours artistique demeure l'un des plus éblouissants du cinéma mondial ; et son style nerveux — non dénué de causticité ni d'élégance — a su rendre visibles puis sublimes des causes honnêtes.

Ce que l'on pourra constater mardi 15 avec Z, explosive critique du régime des Colonels, Oscar du montage et du film étranger. Costa a toujours de savoureuses anecdotes sur le tournage en Algérie et la production homérique de ce brûlot,  chef-d'œuvre intemporel valable pour toutes les dictatures. Le lendemain, il reviendra à ses premières amours, le polar (Compartiment tueurs, d'après Japrisot) et présentera la copie restaurée de État de siège, avant de nous laisser seuls en compagnie de la suite de sa rétrospective.

Un seul film vous manque...

Rétrospective, mais pas intégrale. L'insondable mystère des gestions de droits (ou le calendrier de sortie des copies restaurées, tout est lié) peut expliquer que sa Palme d'Or 1982 Missing — un comble — fasse partie des absents. On se consolera grâce à des classiques et des raretés : après Hanna K présenté en début de cycle, on (re)verra avec curiosité La Main droite du diable (1988), où Debra Winger s'infiltre chez des sympathisants du Ku Klux Klan, et le tristement prémonitoire Eden à l'Ouest (2008) sur la tragique situation des migrants, rejetés par les Européens.

Enfin, en "goodies",  la galerie de l'Institut nous offre de parcourir la mémoire privée du cinéaste en accrochant ses clichés : des images d'amis et de compagnons de route (Montand, Castro, Semprun, Allende…) ; des paroles en noir et blanc de celui qui est davantage qu'une conscience de notre temps : un témoin agissant.

Costa-Gavras
A l'Institut Lumière mardi 15 et mercredi 16 septembre
Rétrospective jusqu'au 3 octobre


<< article précédent
Collection, petit miracle pop