La rentrée des crasses

Deux festivals, de nouvelles pièces d'auteurs chéris, le retour d'un illustre représentant de la trop lointaine école anglo-saxonne... La saison café-théâtre démarre plutôt fort.


En temps normal, il est presque inconvenant de parler d'une "rentrée" en matière de café-théâtre, les lieux homonymes ne connaissant de pauses que celles qui précèdent les punchlines de leurs invités. Cette saison 2015/2016 n'a cependant rien d'habituel ; pour preuve, elle s'ouvrira, passée la traditionnelle Semaine de l'humour (10€ dans les lieux participants, du 16 au 27 septembre) sur deux festivals.

À gauche l'arlésienne Juste pour Lyon, émanation à crinière du célèbre raout canadien Juste pour rire qui, du 28 septembre au 7 octobre, investira en off la plupart des salles de musculation des zygomatiques de la ville. La programmation officielle sera elle délocalisée au casino Le Lyon Vert et verra se succéder les solitaires-en-scène les plus prometteurs du moment : la soundbank humaine Jibé (qui commence à faire son trou chez nos cousins d'Amérique), le chic type survitaminé Vérino (pour une édition spéciale de son inglorious comedy club, en présence notamment du couple star de Bref), la team Jocelyn Flipo (Alex Ramirès, Yann Guillarme, Gérémy Crédeville... pour moitié à l'affiche d'une "Nuit des Gônes" présentée par Raphaël Mezrahi),  Antonia de Rendinger, Aymeric Lompret avec un nouveau spectacle prenant pour point de départ son fameux craquage chez Ruquier...

À droite l'Espace Gerson ne s'en laisse pas compter et présentera les 2 et 3 octobre à la Salle Rameau la troisième édition de son événement maison où se produiront, sous la houlette des désormais inséparables Victor Rossi et Antoine Demors, l'excellent Arnaud Cosson et, plus surprenant, Warren Zavatta (petit fils de et vulgarisateur de la chose circassienne devant l'éternel), tous deux précédés d'une sélection de jeunes qui n'en veulent – on mise une pièce sur Camille et Aurel, qui ont tenu la boutique cet été.

Pièces uniques et de série

Évidemment, tout ce petit monde sera à pied d'œuvre sur l'ensemble du trimestre. Ainsi des Flipo boys évoqués plus haut qui squatteront le Boui Boui (Guillarme et Crédeville jusqu'au 30 septembre, François Martinez du 15 au 30), exception faite de Karim Duval (aux Tontons Flingueurs jusqu'au 5 décembre puis au Complexe du rire), tandis que leur manager présentera au Rideau Rouge sa nouvelle comédie, Super (du 29 septembre au 30 décembre), variation sur le canon super-héroïque avec Yohan Genin et les adorables Thaïs Vauquières et Alexandra Bialy – la précédente, le huis clos meurtrier Couic!, étant à l'affiche de la Comédie Odéon jusqu'au 26 septembre.

En parlant de huis clos, ne pas manquer, au même endroit, jusqu'au 26 décembre, la reprise de Plein phare, mètre-étalon de l'attraction des contraires selon Jacques Chambon (avec Jonathan Chiche et Jordan Topenas) et Milady en sous-sol, cette fois au Boui Boui la relecture avec cambrioleur du conte de la Belle aux bois dormant qu'il a imaginée pour le couple Aurélien Portehaut-Chrystel Rochas (du 19 septembre au au 26 décembre). Chambon qui, résidence oblige, offrira cette saison encore la primeur de sa nouvelle pièce au Karavan de Chassieu (le 9 octobre), Calamity Job, comédie à trois voix sur les petites bassesses et grands coups de pute propres au monde de l'entreprise (visible ensuite à la Maison de Guignol du 15 novembre au 31 décembre).

Son complice Dominic Palandri (qu'il retrouvera à l'affiche de Carton Rouge au Complexe en janvier) fera lui aussi un tour à Chassieu le 17 février avec son pas de deux métaphysique New York Paradis, après un long run au Complexe du rire (30 septembre au 7 novembre).

Quant à Victor Rossi, en marge de son ménage à trois avec Demors et Jefferey Jordan (du 23 au 30 septembre à Gerson) il marchera sur leurs traces en écrivant et interprétant (Gerson encore, du 28 octobre au 7 novembre) Le Chant des baleines, duel crépusculaire opposant un comédien imbuvable et un auteur affable.

Seuls ou à plusieurs

Du côté des mecs qui parlent tout seuls, en marge de l'habituel troupeau d'éléphants plus ou moins lourdingues (Semoun, Bigard, Palmade, Bénureau, Foresti...) et d'une nouvelle tête a priori bien faite (Jean Rémi Chaize, au Complexe du 16 septembre au 17 octobre), on guettera plus particulièrement les retours de la grande gueule David Bosteli (aux Tontons du 17 septembre au 3 octobre), du faux pauvre type Julien Santini (Gerson, du 2 décembre au 2 janvier), d'Alex Lutz (au Radiant-Bellevue le 24 octobre), de Pierre-Emmanuel Barré (pareil, mais le 11 décembre) et, surtout, du so british et so queer Eddie Izzard avec son spectacle french-friendly (au Rideau Rouge le 5 octobre).

Tout comme on guettera leur potentielle relève dans les rangs des principales compagnies d'improvisation du cru : Amadeus Rocket, de retour à la Comédie-Odéon avec la biographie participative Life Time ; Et Compagnie, toujours bien installée à Gerson avec le cinématographique Story Board, Bazar et, nouveauté, Broadway sur mesure, une comédie musicale sans filet (son festival, Spontanéous, se tenant lui du 18 au 24 octobre) ; Les Improlocos, qui revisiteront les intrigues de pouvoir façon Game of Thrones au Complexe ; La Lily qui en sus de ses rendez-vous réguliers (Hors piste, Impro'minots) repart pour une saison de battles au Transbordeur ; et toutes celles qui animeront la deuxième saison de l'Improvidence, aussi remplie que la précédente.


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Une saison revue à la baisse