En formation serrée


Amis lecteurs, si vous n'avez toujours pas entendu le vol noir du corbeau sur la plaine, now is the time. Car le noir volatile vient de retrouver, à l'occasion de la dix-septième édition du Riddim Collision, dont il est l'animal totem, l'emploi d'oiseau de plus ou moins bon augure qui était le sien dans la mythologie scandinave, annonçant l'arrivée au Transbordeur d'une nuée de ses congénères aux ramages ambigus.

À commencer par Ho99o9 (prononcez "Horror"), duo du New Jersey qui, à l'instar des deux chantres de la difformité présentés ici, nourrit une passion aussi captivante que dérangeante pour la difformité (son premier EP s'intitulait Mutant Freax) et la canalise en de foudroyantes décharges nihilistes mi-punk mi-hip-hop.

Radical et hybride, Gum Takes Tooth ne l'est pas moins, cet autre binôme (de Londres cette fois) orchestrant à visages couverts la rencontre, forcément impressionnante, de la noise maximaliste à la Fuck Buttons (décidément) et des folklores tribaux d'Afrique et d'Amérique du Sud – de quoi conforter dans leurs propres démarches de métissage électro-primitives la Lyonnaise Flore et le Breton Débruit, également à l'affiche.

Embrasser les ténèbres, c'est aussi le propos de Prefuse 73, labelmate de Clark et autre sommité du chausse-trappe rythmique et du collage vocal, mais pour mieux faire la synthèse additive des couleurs – comme le font par ailleurs, plus explicitement, le prodige de l'electronica au format auditorium Chapelier Fou et le Luxembourgeois Sun Glitters, qui produit une chillwave dont la finesse n'a d'égale que la sensualité.

Enfin, on prêtera plus particulièrement l'oreille à DJ Krush, petite frappe japonaise éprise de soul et de jazz qui, dans la deuxième moitié des années 90, contribua à élever l'abstraction et le concassage aux rangs d'art. Souvent présenté comme le DJ Shadow du Pays du soleil levant (alors que ses débuts précèdent Entroducing de deux ans), Hideaki Ishi a récemment publié son premier long depuis onze ans. Il s'appelle Butterfly Effect et, à l'instar de ses prédécesseurs, voit son auteur trouver un équilibre typiquement nippon entre tradition et modernité, application et lâcher prise, histoires de fantômes spleenétiques et constats désabusés sur l'état du monde.

Riddim Collision
Au Transbordeur vendredi 13 et samedi 14 novembre


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