Only Porn, c'est le pied

Only Porn, le «festival des cultures pornographiques» du Lavoir Public, remet le couvert pour la quatrième fois. Insolite et nécessaire.


Et soudain, tout fut à refaire. James Deen et Stoya étaient un peu les Brad Pitt et Angelina Jolie de l'industrie pornographique : de beaux gens jeunes gens cultivés et successful dont les débats oxymoriques (physiques next door/pratiques hardcore, caresses/gifles, sourires/plaintes) et, de fait, "réalistes", chauffaient les bas ventres des diggers de tubes pour adultes comme ceux des transgresseurs hip à la petite semaine – magazines genrés, presse lifestyle et autres news culturels en tête.

Las, c'était avant qu'elle n'accuse récemment son partenaire (à la ville comme à la scène) de viol et que d'autres actrices n'en profient pour faire état d'abus similaires, dénonçant au passage un milieu qui, profitant de l'essor d'une génération de performers inhabituellement représentatifs de leurs contemporains (d 'abord incarnée à elle seule par Sasha Grey) pour se faire une respectabilité, demeure pour l'essentiel une phallocratie régie par la loi du silence.

Pour Only Porn, une telle actualité a a priori tout d'une mauvaise publicité. En vérité, c'est une aubaine, ce festival pluridisciplinaire créé par les jouisseurs à tête bien faite du Lavoir Public mettant en lumière des artistes pour lesquels la mise en scène de la sexualité (ludique, réfléchie, respectueuse de soi et des autres) est un vecteur d'épanouissement personnel et sociétal.

Les métamorphoses

À cet égard, sa quatrième édition ne pouvait rêver invitée de marque plus raccord avec ces questionnements qu'Ovidie, actrice passée derrière la caméra et le clavier qui, comme Brigitte Lahaie ou les filles du clan Despentes (Coralie Trinh Thi, feu Karen Lancaume) avant elle, figure depuis le début des années 2000 une certaine intelligenstia française de la chose – on se souvient avoir succombé à la ténébreuse impassibilité de cette «travailleuse du sexe» revendiquée non pas via un film X, mais grâce à un reportage la présentant d'abord comme une étudiante en lettres.

Elle animera la soirée de clôture du festival, le temps d'une carte blanche et d'une rencontre revenant sur sa prolifique et brillante carrière, de ses réalisations pour Marc Dorcel à ses documentaires (dont le récent À quoi rêvent les jeunes filles ?, sur les pratiques de l'hyper connectée génération Y) en passant par ses billets pour Metronews.

Au programme également : des expositions,  des performances de la fidèle Wendy Delorme, un vide-dressing fétichiste, du clubbing en bonne compagnie ou encore une célébration en dix films des dix ans de l'avant-gardiste Berlin Porn Film Fest en présence de son programmateur (le second immanquable de l'événement, in our humble opinion). Ça promet.

Only Porn
Du jeudi 10 au dimanche 13 décembre au Lavoir Public


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