Tout en haut du monde


Le renouveau de l'animation viendrait-il de la diversité européenne ? Même si l'on trouve mille qualités à Vice-Versa, à Dragons voire à L'Âge de glace, l'honnêteté oblige à admettre que ces films souffrent d'un regrettable conformisme esthétique — quand ils ne succombent pas à certains gimmicks narratifs. Comme si la créativité de leurs auteurs ne pouvait s'exprimer qu'à l'intérieur d'un champ clos produisant des fruits ronds, colorés et sucrés, à la saveur prévisible. De notre côté de l'Atlantique, les cinéastes ont une autre approche : ils ne cherchent pas à rivaliser dans la restitution de la réalité — cette course à l'échalote technique servant d'argument aux films ayant les scénarios les plus pauvres —, ils investissent l'écriture en traitant de sujets plus segmentants, moins glamour ; et réfléchissent à la dimension plastique de leurs œuvres.

Découvrir Tout en haut du monde, c'est avoir le regard ébloui par une bourrasque de pureté et de clarté. Rémi Chayé propose un traitement visuel allant à l'essentiel, très flat design, qui change les perspectives et perturbe les repères : au lieu de délimiter les décors, les personnages, il opte pour des jeux d'aplats et de couleurs douces — évoquant subtilement l'immensité ininterrompue des banquises.
Chayé, qui a travaillé auprès de Jean-François Laguionie et Tomm Moore, a été à bonne école : celle d'une animation divergente, osant tout azimut pour ne demeurer prisonnière d'aucun dogme. Quel plaisir, donc, de palpiter pour Sacha, héroïne poursuivant un idéal, et non “princesse” chantante en quête d'un coquin ! Inutile de préciser que ce film aussi beau qu'émouvant réussit le test de Bechdel… VR

Tout en haut du monde
De Rémi Chayé (Fr, 1h20) animation


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